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union européenne - Page 3

  • Instrumentalisation de l’immigration : la capitulation de l’Union européenne...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Paul Tormenen, cueilli sur Polémia et consacré à l'instrumentalisation des flux migratoires contre l'Union européenne.

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    Instrumentalisation de l’immigration : la capitulation de l’Union européenne

    Les flux migratoires ont pris une ampleur considérable en ce début de 21ème siècle. Les pays européens sont particulièrement vulnérables : le manque de contrôles aux frontières et un arsenal juridique favorable permettent en effet à de nombreux migrants clandestins d’entrer en Europe et de s’y maintenir. Les dirigeants de certains pays tiers l’ont bien compris et utilisent l’ouverture intermittente de leurs frontières pour faire pression sur les États européens et sur l’Union européenne.
    Pourtant, en dépit de l’usage répété de ce nouveau moyen de pression, l’Union européenne multiplie les obstacles aux mesures permettant aux pays européens agressés de se défendre. L’évolution possible du contexte politique dans les pays du sud de l’Europe pourrait bientôt changer la donne.

    Les différents aspects de l’instrumentalisation des flux migratoires par des pays tiers à l’U.E. abordés dans le présent article sont les suivants :

    1- L’instrumentalisation des flux migratoires, une nouvelle forme de conflit ;
    2- L’instrumentalisation des migrants, une pratique devenue courante ;
    3- L’instrumentalisation des migrants, une stratégie payante ;
    4- Le droit au service de l’immigration clandestine ;
    5- De nombreux pays européens ont renoncé à faire respecter leurs frontières ;
    6-Les évolutions envisagées dans le cadre du pacte européen sur l’asile et les migrations : un cautère sur une jambe de bois ;
    7- Un motif d’espoir : l’évolution possible du contexte politique dans les pays du sud de l’Europe.

    1- L’instrumentalisation de l’immigration, une nouvelle forme de conflit

    L’instrumentalisation des flux migratoires s’inscrit dans le contexte de l’émergence de nouvelles formes de conflits (cyberattaques, sanctions économiques, etc.), communément désignées sous le terme de « guerre hybride ». Le centre d’excellence pour la lutte contre les menaces hybrides rattaché à l’OTAN décrit une menace hybride comme une action « coordonnée et synchronisée et ciblant délibérément les vulnérabilités des États et des institutions démocratiques. (Les guerres hybrides) sont conduites à l’aide d’un large éventail de moyens et conçues pour rester en deçà du seuil de détection et d’attribution. (…) L’objectif est de saper ou de nuire à une cible en influençant sa prise de décision au niveau local, régional, étatique ou institutionnel » (1).

    Le conseil de l’Union européenne donne la définition suivante de l’instrumentalisation des migrants : « des situations dans lesquelles un pays tiers ou un acteur non étatique a (…) encouragé ou facilité le déplacement irrégulier de ressortissants de pays tiers vers (…) un territoire, afin que ceux-ci se rendent à la frontière extérieure des États membres ». (2)

    Le mode opératoire consiste précisément à provoquer un afflux massif et soudain de migrants clandestins dans un pays donné, dans l’objectif – non revendiqué officiellement – de faire pression sur les autorités de ce pays en désorganisant sa capacité de riposte et en saturant ses capacités d’accueil, afin d’en obtenir un bénéfice.

    2- L’instrumentalisation des migrants, une pratique devenue courante

    La question migratoire est particulièrement sensible en Europe. Depuis le début des années 2010, l’immigration extra-européenne y a pris une ampleur considérable, amenant une partie non négligeable de l’électorat à voter pour des partis politiques prônant un coup de frein à l’immigration tant légale que clandestine (3). Dans ce contexte, l’afflux plus massif et brutal qu’à l’accoutumée de migrants dans l’un des pays de l’Union européenne est surveillé avec attention par nos dirigeants. Certains chefs d’État de pays tiers ont bien compris le bénéfice qu’ils pouvaient en tirer.

    Les tentatives de déstabilisation des États européens par l’ouverture aussi brutale que temporaire des frontières aux migrants ont été nombreuses ces dernières années. On peut même dire qu’elles se multiplient, en dépit d’accords prévoyant un contrôle des départs des clandestins des pays qui utilisent un tel procédé. Nous n’en présenterons que six parmi les plus importantes.

    Le 2 mars 2020, le président de la République turque, R.T. Erdogan, brandissait la menace de l’arrivée de millions de migrants en Europe en ouvrant ses frontières avec la Grèce (4). Quelques jours plus tard, le 7 mars, il mettait sa menace à exécution. Des milliers de clandestins se massaient à la frontière entre la Turquie et la Grèce et pour certains d’entre eux, affrontaient les forces de l’ordre grecques (5). Plusieurs experts en géopolitique s’accordent sur le fait que R.T. Erdogan a amené les migrants à la frontière grecque pour faire pression sur l’Union européenne afin que celle-ci soutienne – ou à tout le moins ne condamne pas – ses opérations militaires menées dans la période en Syrie.

    Le 17 mai 2021, plusieurs milliers de migrants d’origine subsaharienne forçaient la frontière entre le Maroc et l’Espagne afin d’accéder au territoire de Ceuta, parfois en agressant des douaniers espagnols (6). Ces franchissements n’ont très certainement été possibles qu’avec le consentement tacite des autorités marocaines. Bien que non revendiquées officiellement, il s’agissait sans nul doute de représailles du gouvernement marocain, après que le gouvernement espagnol ait autorisé un leader du Front Polisario, militant pour l’autonomie du Sahara occidental, à se faire soigner en Espagne.

    Suite au détournement le 23 mai 2021 par le gouvernement biélorusse d’un avion de la compagnie Ryan Air à Minsk afin d’arrêter un dissident politique, l’Union européenne a durci à partir du mois de juin de cette même année les sanctions à l’encontre de la Biélorussie impactant plusieurs secteurs de son économie.

    La riposte des autorités biélorusses ne s’est pas faite attendre : elles ont rapidement organisé une offensive migratoire contre les pays voisins membres de l’Union européenne, la Lituanie, la Lettonie et la Pologne. Des navettes aériennes ont ainsi acheminé depuis leur pays d’origine ou d’accueil (Turquie, Syrie, Irak, Liban, etc.) des milliers de migrants en Biélorussie, qui ont ensuite été poussés vers la frontière occidentale du pays. La réponse ferme des pays limitrophes et des démarches diplomatiques ont permis en fin d’année de « calmer le jeu » entre les parties concernées.

    En novembre 2021, le gouvernement chypriote constatait une hausse considérable du nombre de migrants arrivant sur l’île par rapport à l’année précédente (+38%) (7). Il accusait la Turquie de vouloir déstabiliser son pays et d’instrumentaliser les migrants en leur permettant de traverser la ligne de démarcation séparant l’ile. Le contentieux sur la reconnaissance de la partie turcophone de l’ile n’est très probablement pas étranger à cet afflux soudain de migrants essentiellement musulmans venant pour beaucoup de Turquie avec un visa étudiant.

    Depuis quelques mois, en dépit de l’accord entre l’Union européenne et la Turquie conclu en 2016, prévoyant notamment un contrôle et une contention des départs des migrants, le rythme des arrivées des clandestins en Grèce venus de Turquie a considérablement augmenté. Selon plusieurs observateurs, cette accélération fait suite aux déclarations du Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, devant le Congrès américain le 17 mai, sur les menaces et les violations de l’espace aérien et maritime grec venant d’un « pays tiers », une façon à peine voilée de pointer la Turquie (8).

    Début juillet 2022, le nombre des arrivées des embarcations clandestines parties d’Algérie sur les côtes espagnoles, à Almeria, a fortement augmenté. Selon le quotidien espagnol El Mundo, les autorités espagnoles s’attendaient à ce que le gouvernement algérien ne reste pas inerte suite à leur revirement sur la question du Sahara occidental, dans un sens favorable au Maroc (9). Un signe ne trompe pas : en juin, les autorités algériennes suspendaient la construction de murs destinés à empêcher les départs clandestins des côtes du pays vers l’Espagne (10).

    3- L’instrumentalisation des migrants, une stratégie payante

    L’instrumentalisation des migrants est très souvent une stratégie payante. Les concessions que doivent faire les États européens et l’Union européenne suite à des offensives migratoires lancées par des États tiers ne font bien évidemment pas l’objet d’une publicité tapageuse. Pour le pays hostile, il s’agit de garder cet atout en main afin de pouvoir le réutiliser. Pour l’État européen et/ou l’Union européenne ayant fait l’objet d’une manœuvre hostile, il s’agit de ne pas perdre la face en montrant sa faiblesse.

    C’est dans la modification aussi discrète que réelle des relations entre États à la suite de ces épisodes d’instrumentalisation de migrants que l’on peut percevoir leur efficacité , comme par exemple l’étrange complaisance de l’U.E. face aux multiples provocations du président turc, R.T. Erdogan, la position des autorités espagnoles soudainement plus favorable au gouvernement marocain au sujet de la question du Sahara occidental, etc.

    Si l’instrumentalisation des migrants a parfois des conséquences dramatiques pour certains d’entre eux, elle permet à d’autres de profiter de l’ouverture temporaire des frontières. Pour ne donner qu’un exemple parmi d’autres, l’offensive migratoire lancée par la Maroc en mai 2021 a permis à de nombreux de migrants d’entrer sur le territoire espagnol de Ceuta, d’y rester ou de gagner le continent européen.

    Outre les manœuvres de pays tiers, les pressions exercées contre des pays membres de l’Union européenne tirent leur efficacité d’un certain nombre de facteurs Parmi ceux-ci, on peut citer l’attractivité sociale et économique des pays européens, un droit excessivement favorable aux clandestins et le renoncement des pays européens à faire respecter leurs frontières.

    4- Le droit au service de l’immigration clandestine

    Les migrants clandestins ne seraient pas aussi déterminés à entrer dans les pays de l’Union européenne s’ils n’avaient pas bon espoir d’y rester. Pour ce faire, nombre d’entre eux font valoir leur droit à la protection au titre de l’asile ou de leur âge. Ils peuvent s’appuyer pour cela tant sur le droit communautaire que sur les conventions internationales (sur l’asile, la protection de l’enfance, etc.) ratifiées par les pays membres de l’Union européenne. La règle du non refoulement est fréquemment invoquée par les défenseurs des migrants clandestins pour qu’ils puissent pénétrer dans les pays de l’Union européenne et faire valoir ces droits. Et quand bien même les migrants sont déboutés de leur demande, la piteuse politique des pays européens de reconduite des clandestins dans leur pays leur assure fréquemment un maintien en Europe sans trop de soucis.

    5- De nombreux pays européens ont renoncé à faire respecter leurs frontières

    Étroitement corsetés par un droit excessivement favorable aux clandestins, incapables tant juridiquement que moralement de défendre l’intégrité de leur territoire, les pays européens et l’Union européenne ont cherché à sous-traiter la protection de leurs frontières. Mais ils ont par cela créé les conditions de leur propre dépendance et de leur asservissement. L’accord le plus connu à ce sujet est celui conclu à grand frais entre la Turquie et l’Union européenne en 2016.

    L’Union européenne a également noué des partenariats avec plusieurs pays africains d’où partent les clandestins (11). Des accords visant à éradiquer les réseaux de trafic de migrants et de traite d’êtres humains ont ainsi été conclus avec la Libye, le Maroc et la Tunisie. Il s’agit aussi plus officieusement d’empêcher les départs de bateaux clandestins des côtes de ces pays vers l’Europe. Ces pays bénéficient à ce titre d’importants subsides de l’Union européenne.

    L’Italie et l’Espagne ont également conclus des accords bilatéraux avec des pays d’Afrique du nord afin d’éviter les départs et d’intercepter les migrants se dirigeant vers leur pays. Cette externalisation du contrôle des frontières de l’Union européenne, qui permet de limiter le nombre des départs d’Afrique, fait l’objet de critiques véhémentes de la part de nombreuses O.N.G. et du lobby immigrationniste (12).

    6- Les évolutions envisagées dans le cadre du pacte européen sur l’asile et les migrations : un cautère sur une jambe de bois

    Compte tenu des compétences partagées avec les États en matière migratoire, l’Union européenne apporte t-elle des solutions aux pays victimes d’offensives migratoires organisées par des pays tiers ?

    L’exemple de l’offensive migratoire menée par la Biélorussie en 2021 est très révélatrice à ce sujet.

    Alors que la Pologne déployait l’armée pour stopper les milliers de migrants poussés par les autorités biélorusses, la Commission européenne proposait le renfort du corps de garde-frontières Frontex. Les autorités polonaises ont purement et simplement décliné cette proposition. La raison ? Elles ne voulaient que des « observateurs des droits fondamentaux » de l’agence européenne vienne accumuler des preuves de la violation du principe de non refoulement. Les efforts de la commissaire européenne aux affaires intérieures, Ylva Johansson, visant à ce que la pratique des douaniers polonais aux frontières soit « conforme avec l’acquis communautaire » ont été vains. « La commissaire Johansson a échoué à convaincre la Pologne sur les refoulements », titrait le site d’information Euractiv le 1er octobre 2021 (13). Il faut pourtant être aveugle pour ne pas voir que l’application de la règle du non refoulement aboutit à céder aux manœuvres des États hostiles.

    Les évolutions envisagées dans le cadre du pacte européen sur l’asile et les migrations donnent-elles des raisons d’espérer ? Les dispositions adoptées lors de la réunion du Conseil de l’Union européenne à Luxembourg le 10 juin 2022 permettent d’en douter (14).

    Dans le nouveau cadre juridique qui doit poursuivre son processus d’adoption, un État peut-il se prévaloir seul d’être victime d’une offensive migratoire pour appliquer des règles plus restrictives d’accès à son territoire ? « l’État membre concerné […] devrait examiner si le Conseil européen a reconnu que l’Union ou l’un ou plusieurs de ses États membres sont confrontés à une situation d’instrumentalisation de migrants ».

    Les frontières du pays agressé pourront-elles être étanches ? «  Les États membres, en particulier dans un cas d’instrumentalisation des migrants, lorsque des ressortissants de pays tiers tentent, en masse, de forcer l’entrée par des moyens violents, peuvent prendre les mesures nécessaires pour préserver la sécurité et l’ordre public. […] Ces limitations et mesures devraient […] être appliquées de manière à garantir le respect des obligations liées à l’accès à la protection internationale, en particulier le principe de non-refoulement ».

    Les demandes d’asile seront-elles suspendues dans un tel contexte ? Aucunement. Leur dépôt pourra se faire à des points d’enregistrement précis situés à proximité de la frontière, notamment à des points de passage frontaliers officiels, et dans des délais plus longs.

    Chacun appréciera le peu de résistance que l’Union européenne permet aux pays européens aux offensives migratoires organisées à leur encontre. On peut à ce sujet parler d’une reddition en pleine campagne, à laquelle le gouvernement polonais a courageusement résisté.

    7- Un motif d’espoir : l’évolution possible du contexte politique dans les pays du sud de l’Europe

    Dans un tel contexte, c’est dans la résistance des pays au dogme immigrationniste que l’on peut trouver des motifs d’espoir. Depuis que le gouvernement conservateur est en place, les autorités grecques pratiquent sans le revendiquer de nombreux refoulements de clandestins se dirigeant vers son territoire par la mer Egée (15). Les changements politiques qui pourraient intervenir prochainement en Espagne et en Italie sont également susceptibles de changer la donne dans ces pays.

    En Espagne, le gouvernement multiplie les mesures favorables aux clandestins (régularisations, etc.) Mais, à un an et demi des élections législatives, les socialistes au pouvoir ont connu en juin de cette année une sévère défaite lors de l’élection au parlement andalou. Cela laisse augurer une alternance politique dans le pays moins favorable à l’immigration clandestine, fin 2023.

    Les perspectives d’un changement politique majeur sont plus proches en Italie. Suite à la démission de Mario Draghi du poste de premier ministre, des élections vont être organisées à l’automne et des partis farouchement opposés à l’immigration clandestine, La Lega et surtout Fratelli d’Italia, pourraient bien les remporter.

    L’accession au pouvoir de partis politiques résolument opposés à l’immigration clandestine serait une très mauvaise nouvelle pour les gouvernements des pays qui souhaitent lancer de nouvelles offensives migratoires en Europe. Plus que jamais, la situation politique dans ces pays en première ligne conditionnera la résistance à ces guerres qui ne disent pas leur nom. Mais au-delà de ces perspectives, les dirigeants des pays européens ne pourront pas faire l’économie d’une profonde refonte de tout l’arsenal juridique qui permet à l’immigration clandestine d’atteindre l’ampleur insensée qu’elle a actuellement.

    Paul Tormenen (Polémia, 27 juillet 2022)

     

    (1) « Le concept de guerre hybride : origines, application, contre-action ». Geoplitika.ru. 21 novembre 2021
    (2) « Code frontières Schengen: le Conseil adopte son orientation générale ». Communiqué de presse du Conseil de l’U.E. 10 juin 2022
    (3) « L’Invasion de l’Europe – Les chiffres du Grand Remplacement » : la preuve par les faits ». Polémia. 4 décembre 2020
    (4) « Erdogan menace l’Europe de « millions » de migrants ». Le Point. 2 mars 2020
    (5) « Turquie : des milliers de migrants se massent à la frontière avec la Grèce ». Le Parisien. 1er mars 2020
    (6) « Espagne. Près de 6 000 migrants arrivés en moins de 24 heures à Ceuta depuis le Maroc ». Breizh Info. 18 mars 2021
    (7) « Chypre veut suspendre les demandes d’asile ». Infomigrants. 12 novembre 2021
    (8) « Les tensions entre la Turquie et la Grèce aboutissent à une rupture du dialogue ». Econostrum. 24 mai 2022
    (9) « Argelia cumple su amenaza y empieza a inundar de pateras las costas españolas ». El Mundo. 1er juillet 2022
    (10) « Argelia paraliza la construcción de los muros de contención de salida de ilegales a España ». La Gaceta de la Iberosfera. 15 juin 2022
    (11) « Joint communication to the European Parliament, the European Council and the council. Migration on the Central Mediterranean route Managing flows, saving lives ». Commission européenne. 25 juillet 2017
    (12) « Externalisation des frontières de l’Union européenne ». Pour la solidarité. Juillet 2020
    (13) « Commissioner Johansson failed to convince Poland on pushbacks ». Euractiv. 1er juillet 2021
    (14) « Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2016/399 concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes ». Conseil de l’Union européenne. 9 juin 2022
    (15) « En 2021, une ONG comptabilise 629 cas de refoulements illégaux dans les îles grecques ». Infomigrants. 7 janvier 2022

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  • Immigration : le directeur de Frontex jette l’éponge, les No Border jubilent...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de Paul Tormenen, cueilli sur Polémia et consacré à l'affaire Frontex. Edifiant...

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    Immigration. Le directeur de Frontex jette l’éponge, les No Border jubilent

    Le 28 avril, le directeur exécutif de l’agence européenne de garde-côtes et garde-frontières Frontex, Fabrice Leggeri, a présenté sa démission à son conseil d’administration. Cette décision, lourde de conséquences, intervient après une longue campagne de dénigrement de l’activité de Frontex. Au-delà du cas individuel de F. Leggeri, sa démission illustre le rapport de force au sein des institutions européennes, qui a clairement penché en faveur des partisans de l’ouverture inconditionnelle des frontières aux extra-Européens. Le changement attendu des modalités d’intervention de Frontex va sans aucun doute entraîner une accélération des flux d’immigration clandestine à destination de l’Europe. La jubilation des militants sans frontières à la suite de cette annonce n’a d’égal que l’aveuglement d’Emmanuel Macron qui évoquait dans son programme en vue de la récente élection présidentielle « l’Europe des frontières qui lutte contre l’immigration clandestine ».

    Des campagnes d’opinion à répétition contre Frontex

    Les critiques les plus virulentes contre le rôle et l’action de Frontex ont commencé en 2012. Il s’agissait – déjà – de dénoncer le fait que la politique migratoire européenne faisait supposément prévaloir la sécurité des frontières sur la protection des personnes. Le réseau Migreurop organisait alors une campagne auprès de l’opinion publique visant rien de moins que la suppression de Frontex (1).

    Peu après, une campagne appelée « Frontexit » était lancée à partir de mars 2013 pour recenser les « violations des droits humains » par certains des agents du corps de garde-côtes et garde-frontières (2).

    Durant les dernières années, de nombreux médias et des politiciens ont également mené un véritable travail de sape contre les actions de Frontex visant à endiguer l’immigration clandestine à destination de l’espace Schengen. Il est dans le contexte actuel utile d’en rappeler quelques faits marquants.

    On ne compte plus les articles dans les médias de grand chemin accusant Frontex de pratiquer une chasse aux migrants, d’être une « armée d’occupation » (!), d’avoir un « océan d’impunité », d’exercer son action en toute opacité, etc. (3). Au-delà des accusations « morales », des journalistes d’investigation ont cherché à argumenter leurs griefs à l’encontre de Frontex. Ils ont pour cela bénéficié d’importants moyens financiers.

    En octobre 2020, l’hebdomadaire allemand Der Spiegel et le site d’investigation Bellingcat rendaient public une enquête à charge contre Frontex. Se basant sur l’exploitation d’informations en accès libre et sur des témoignages d’ONG, Bellingcat accusait l’agence Frontex d’avoir pratiqué plusieurs refoulements de clandestins en mer Égée, entre la Turquie et la Grèce, entre les mois d’avril et d’août 2020 (4). Ces accusations ont été reprises par l’hebdomadaire allemand Der Spiegel dans un article du 22 octobre 2020 et ont ensuite été très largement médiatisées, souvent sans aucun recul critique (5).

    Les journalistes du Spiegel précisent à la fin de l’article consacré à l’enquête que celle-ci a été financée par l’Investigative Journalism for Europe (IJFO), une fondation qui soutient le journalisme d’investigation dans l’Union européenne. L’IJFO ne cache pas, sur son site, avoir comme cofinanceur l’Open Society Foundations et… la Commission européenne (6).

    Le site d’investigation Bellingcat a, quant à lui, reçu entre 2016 et 2018 383 000 dollars de l’Open Society Foundations. Il fait partie du Global Investigative Journalism Network, dont la vocation est la formation et l’échange d’informations entre journalistes d’investigation. Cette association a reçu entre 2017 et 2019 1,1 million de dollars de l’Open Society Foundations (7). Le créateur de l’Open Society Foundations n’est autre que le milliardaire américain George Soros, qui a abondé sa trésorerie de la modique somme de 18 milliards de dollars en 2017 (8).

    Mais, en dépit de son retentissement, cette première charge ne devait pas être suffisante. Le 27 avril 2022, plusieurs médias dont Le Monde, Der Spiegel et Lighthouse Reports renouvelaient leurs critiques contre la direction de Frontex. Les conclusions de leur nouvelle enquête publiée notamment dans le journal Le Monde mettent une nouvelle fois en exergue la pratique de refoulements en mer Égée, qui seraient connus mais tolérés ainsi que le fait que Frontex aurait « maquillé des renvois illégaux de migrants » (9). Une nouvelle fois, l’ombre de George Soros n’est jamais loin. L’Observatoire du journalisme a, en effet, dans un article récent, mis en lumière les liens, à tout le moins financiers, entre Lighthouse Reports et l’Open Society Foundations et l’Open Society European Policy Institute (10).

    Pourquoi mentionner le financement – direct ou indirect – de ces enquêtes ? Parce que George Soros œuvre depuis de nombreuses années pour l’accueil le plus large de migrants en Europe. Il a même été qualifié par le journal Valeurs actuelles de « militant de la submersion migratoire » (11). Et c’est bien sous le prisme unique du droit inconditionnel des migrants à s’installer en Europe que ces enquêtes ont été réalisées, indépendamment de toute considération pour les populations autochtones, notamment leur droit à la continuité historique

    La guérilla contre Frontex au sein de l’UE

    Les accusations contre Frontex ont également été portées dans et parfois par les institutions européennes.

    En décembre 2020, des parlementaires européens d’extrême gauche et écologistes demandaient à la suite de la parution du reportage du Spiegel et de Bellingcat une enquête sur le fonctionnement de Frontex. Certains d’entre eux exprimaient – déjà – sans équivoque le souhait que Fabrice Leggeri démissionne (12).

    En janvier 2021, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) annonçait de façon laconique engager une enquête sur Frontex, sans toutefois dévoiler le périmètre de sa mission (13).

    En avril 2021, une majorité de parlementaires européens refusaient d’approuver le budget de Frontex de l’année 2019. Outre des considérations d’ordre financier, la pratique des refoulements par des agents de Frontex était mise en accusation (14).

    Si ce budget a été finalement approuvé, une majorité de parlementaires demandaient en octobre 2021 à la Commission européenne de geler une partie de celui de l’année 2022. Les conditions posées au déblocage des fonds étaient les suivantes :

    • le recrutement de vingt officiers aux droits fondamentaux et de trois directeurs exécutifs dotés de qualifications suffisantes ;

    • la mise en place d’un mécanisme de signalement des incidents graves aux frontières extérieures de l’UE et la création d’un système opérationnel de surveillance des droits fondamentaux (15).

    Le 24 mars 2022, l’ONG. no border Front-LEX adressait une mise en demeure de treize pages à la commissaire européenne aux affaires intérieures, Ylva Johansson. Dans ce document, Front-LEX enjoignait la Commission européenne d’engager une procédure visant à la démission de Fabrice Leggeri (16). L’ONG. menaçait par ailleurs d’engager des poursuites devant la Cour de justice de l’Union européenne en cas d’inaction de la part de la Commissaire européenne.

    Le 31 mars, une majorité des membres de la commission de contrôle des comptes de l’UE refusait de valider les comptes de Frontex, principalement pour le motif de pratiques de refoulement de migrants et de demandes d’asile refusées en Hongrie (17).

    Leggeri « lâché » par la France ?

    C’est dans ce contexte d’accusations incessantes que s’est tenu le conseil d’administration de Frontex le 28 avril. Avant même la publication du rapport de l’OLAF sur la gestion de l’agence, avant même que l’association Front-LEX ne poursuive la commissaire européenne aux affaires intérieures devant la CJUE. et que celle-ci statue sur ses griefs, le conseil d’administration de Frontex a donc décidé d’accepter la démission de Fabrice Leggeri. Le soutien au directeur exécutif de Frontex des représentants de certains pays, la Grèce, la Hongrie et la Pologne, n’aura donc pas été suffisant (18).

    On peut se demander si l’élément déclencheur déterminant de la démission de Fabrice Leggeri n’est pas la fin du soutien que lui apportaient le gouvernement français et le président de la République, Emmanuel Macron…

    Amer, l’ancien directeur de Frontex a envoyé un dernier courriel au personnel de l’agence, qui résume les principaux enjeux liés à sa décision de démissionner :

    « Tout au long des deux dernières années, j’ai pu voir un narratif discret mais efficace envahir notre environnement. Selon ce narratif, l’activité centrale de Frontex devrait être transformée en celle d’une espèce d’agence des droits fondamentaux encadrant ce que font les États membres à leurs frontières extérieures. Mais le mandat qu’a eu Frontex en 2016 et encore plus en 2019, est d’être l’agence européenne de garde-côte et garde-frontière. […] Ma vision était et est encore que Frontex est, avec son rôle opérationnel, une agence agissant pour faire respecter la loi en soutien des États membres et qui contribue au bon fonctionnement de l’espace commun européen de sécurité, de liberté et de justice. J’avais cru comprendre que c’était ce qu’attendent les États membres et les citoyens européens de nous. Je constate que cette vision des choses n’est plus partagée au niveau politique. C’est la raison pour laquelle j’ai pris la décision de démissionner, ne pouvant rester pour mettre en œuvre ce qui n’est pas le mandat de l’agence. J’espère que cette démission va favoriser un débat politique au niveau européen afin de clarifier la mission que l’on attend de Frontex, en espérant que la vision du législateur qui prévalait en 2019 continue à prévaloir dans le futur… » (19). 

    « L’Europe des frontières », pierre angulaire du programme de Macron

    La démission de Fabrice Leggeri met en lumière l’impérieuse nécessité de faire évoluer le principe jusqu’ici intangible du non-refoulement. Il devient en effet de plus en plus manifeste que priver les agents de Frontex et ceux des États européens du pouvoir de décider qui entre sur leur territoire et qui n’y entre pas revient à remettre en cause le principe de régularité du séjour, et, in fine, à abolir les frontières. Cela est d’autant plus vrai que les migrants franchissent la frontière vers l’Europe à partir de pays limitrophes qui leur offrent la possibilité d’exercer leurs droits et où ils n’y sont pas persécutés. On ne peut également pas passer sous silence la motivation économique de ces migrants qui font des milliers de kilomètres pour s’installer en Europe. Il s’agit beaucoup trop souvent de mettre un pied dans la porte d’un pays européen en utilisant un droit individuel, pour n’en plus repartir.

    Lors de la campagne électorale en vue de sa réélection, Emmanuel Macron a fait de « l’Europe des frontières qui lutte contre l’immigration clandestine » l’une des pierres angulaires de son programme en matière migratoire. Quatre jours après son élection, le directeur exécutif de Frontex était débarqué en raison de l’activité de certains de ses agents pourtant conforme à la mission première de l’agence : lutter contre l’immigration clandestine.

    Pire, cette démission, qui devrait se traduire par plus de laxisme et moins de refoulements, intervient dans un contexte d’accélération des flux migratoires. Le nombre de franchissements illégaux détectés des frontières extérieures de l’Union européenne a en effet retrouvé le niveau de 2016, pour atteindre 40 300 entre janvier et mars 2022, soit 57 % de plus qu’en 2021 (20). Et le retour de l’été ne fera, comme les années précédentes, que renforcer cette tendance. Les chiffres sont encore plus inquiétants sur une période longue : durant les sept dernières années, près de trois millions de franchissements illégaux ont été détectés aux frontières extérieures de l’Union européenne. En France, ces flux viennent inéluctablement grossir le nombre de demandeurs d’asile et celui des clandestins qui se maintiennent illégalement sur le territoire.

    Mais l’affaire ne s’arrête pas. L’ONG Front-LEX veut visiblement que d’autres têtes tombent au sein de Frontex. Il est vrai que, une fois l’ancienne équipe de direction de l’agence décimée, il devrait être plus facile de remplacer sa vocation de garde-côtes et garde-frontières par celle d’accueil et d’orientation des migrants clandestins. Front-LEX vient à ce sujet de soumettre une requête auprès de l’OLAF afin d’avoir communication des noms des autres cadres de Frontex « impliqués dans les refoulements systématiques » (21).

    Il ressort de cette affaire qu’un vent mauvais souffle sur les pays membres de l’espace Schengen. Nos dirigeants se privent consciencieusement de tous les outils nécessaires à la maîtrise des flux migratoires. La démission de Fabrice Leggeri doit dans ce cadre être interprétée comme un nouvel aveu d’échec dans une véritable protection des frontières extérieures de l’UE.

    Paul Tormenen (Polémia, 03 mai 2022)

    Sources :

    (1) « Faire sombrer Frontex ». Plein droit. 2014.
    (2) « Frontex : un océan d’impunité ». Politis. 13 mars 2019.
    (3) Requête Frontexit. 29 janvier 2021.
    (4) « Frontex at Fault: European Border Force Complicit in ‘Illegal’ Pushbacks ». Bellingcat. 23 octobre 2020.
    (5) « EU Border Agency Frontex Complicit in Greek Refugee Pushback Campaign ». Spiegel International. 23 octobre 2020.
    (6) Site du Investigative journalism for Europe. « about ». Consultation le 29 janvier 2021.
    (7) Open Society Foundations. Grants. Requête « Global Investigative Journalism Network ». Consultation le 29 janvier 2021.
    (8) « George Soros Transfers Billions to Open Society Foundations ». The New York Times. 17 octobre 2017.
    (9) « Frontex, l’agence européenne de gardes-frontières, a maquillé des renvois illégaux de migrants en mer Égée ». Le Monde. 27 avril 2022.
    (10) « L’offensive médiatique contre la défense des frontières européennes s’intensifie. Seconde partie ». OJIM. 25 décembre 2021.
    (11) « Soros, le militant de la submersion migratoire et de l’islamisme ». Valeurs actuelles. 11 mai 2018.
    (12) « EU Parliament pressing for inquiry into Frontex ». EUobserver. 20 janvier 2021.
    (13) « EU anti-fraud office launches probe into Frontex ». EUobserver. 11 janvier 2021.
    (14) « Immigration : l’agence Frontex sanctionnée par le Parlement européen ». Le Monde. 30 avril 2021.
    (15) « Le Parlement demande le gel d’une partie du budget de Frontex jusqu’à ce que des améliorations clés soient apportées ». Communiqué de presse du Parlement européen. 21 octobre 2021.
    (16) Courrier du 24 mars 2021 de Front-LEX à Ylva Johansson.
    (17) « EU lawmakers refuse to sign off Frontex budget ». EUobserver. 1er avril 2021.
    (18) « EU border agency chief resigns after critical watchdog probe ». Politico. 29 avril 2022.
    (19) Tweet de Steffen Lüdke, 29 avril 2022.
    (20) Bulletin de situation. Frontex. 14 avril 2022.
    (21) Tweet de Front-LEX. 29 avril 2022.

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  • Voyage au Wokistan : l’anti-Europe se dessine à Bruxelles...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Guillaume Durocher cueilli sur le site de l'Institut Iliade et consacré à l'officialisation progressive de l'idéologie "woke" grâce à l'action des institutions de l'Union européenne.

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    Une affiche de campagne de communication pro-islamique du Conseil de l’Europe.

     

    Voyage au Wokistan : l’anti-Europe se dessine à Bruxelles

    Le Parlement européen a adopté récemment une résolution établissant sa position concernant la lutte contre le « racisme » dans la culture, l’éducation, les médias et les sports. Ce texte indigeste constitue un véritable florilège d’exigences ethniques et de novlangue progressiste. Les eurodéputés souhaiteraient lutter contre le « racisme structurel » et imposer « une approche intersectionnelle de l’élaboration des politiques ». Autant dire que Bruxelles a acté sa conversion au wokisme !

    Au-delà de ce vulgaire charabia, la clause la plus choquante est sans doute la suivante : le Parlement exige la censure de médias publiant des informations « stigmatisantes », définies comme celles « ciblant les migrants comme étant la source de divers problèmes socio-économiques et en accordant une couverture disproportionnée aux infractions commises par des migrants ». De fait, les eurodéputés exigent la censure d’informations exactes dans la mesure qu’elles nuisent à l’idéologie dominante. Le fait est que les populations africaines et musulmanes en Europe occidentale sont très souvent disproportionnellement concernées par l’insécurité, l’assistanat et la sous-performance scolaire et économique.

    Immigration, insécurité et « problèmes socio-économiques » : florilège de statistiques

    Les statistiques aussi bien que le vécu quotidien des Européens dans les zones nouvellement « diversifiées » l’attestent. Par exemple, la police de Londres indique qu’en 2019 des Noirs étaient impliqués dans 51 % des attaques au couteau, alors qu’ils ne représentent que 13 % de la population londonienne. Ces chiffres sont stables depuis 10 ans et tout à fait comparable à la criminalité afro-américaine aux États-Unis d’Amérique.En France, une étude de l’INSEE de 2012 avait constaté que les immigrés et les descendants d’immigrés d’origine maghrébine, africaine et turque étaient largement plus concernés par l’échec scolaire, le chômage et l’accès aux HLM que ne l’étaient les indigènes ou les immigrés d’origine européenne ou asiatique.En Allemagne, la décision unilatérale de la chancelière Angela Merkel d’accueillir plus d’un million de prétendus « réfugiés » en 2015 a coïncidé avec une augmentation importante de l’insécurité. Trois années plus tard, les statistiques officielles démontrèrent que 92 % de cette augmentation avait pour cause de jeunes migrants de sexe masculin. Le point culminant de cette vague de violence fut les agressions – dont 500 à caractère sexuel – subites par 1 200 femmes lors de la nuit de la Saint-Sylvestre à Cologne, à Hambourg et dans d’autres villes allemandes. Pendant ce temps-là, le ministère de l’Intérieur allemand tenta d’étouffer l’affaire en supprimant toute mention de « viol » du rapport policier et la Commission européenne affirma qu’il n’y avait aucun lien avec les migrants et qu’il fallait contrer toute réaction « xénophobe ».À Rotherham et dans d’autres villes anglaises, des gangs essentiellement d’origine pakistanaise ont perpétré plus de 2 400 viols sur mineur. Les élus locaux refusèrent pendant des années de s’opposer à ces crimes monstrueux car ils ne voulaient pas « donner de l’oxygène aux opinions racistes ». La devise officielle du conseil municipal de Rotherham ? « Où tout le monde compte. »L’hebdomadaire britannique The Economist a révélé que les migrants originaires du Moyen-Orient et du Maghreb ont un impact fiscal uniformément négatif au Danemark tout au long de la vie, consommant plus en matière d’assistanat et de services publics qu’ils ne contribuent en impôts. Leur situation contraste fortement avec la situation des indigènes danois et des immigrés d’origine occidentale. Le magazine illustra ces chiffres avec un graphique au titre « C’est compliqué », alors que la situation est tout à fait limpide.On peut multiplier ces chiffres pour à peu près tous les pays occidentaux dès lors que les statistiques concernées sont collectées et publiées. Or, toute cette criminalité « disproportionnelle » et tous ces « problèmes socio-économiques » (un bel euphémisme) ont une cause première et fondamentale : l’immigration en Europe des populations concernées. Mais les eurodéputés souhaitent tout simplement interdire aux médias de soulever ces faits qui pourrissent la vie des Européens.

    Imposer la censure dans les médias audiovisuels et les réseaux sociaux

    Le Parlement européen ne fait pas que demander la censure de faits embarrassants. Il exige que les autorités de réglementation audiovisuelle (CSA et autres) aient plus de compétences pour censurer des émissions ayant « des contenus discriminatoires ou racistes » et qu’on élimine les financements publics aux médias promouvant des « discours haineux et xénophobes ». Au contraire, les médias devraient « éviter les pratiques qui entretiennent ou renforcent les stéréotypes négatifs concernant des minorités ethniques ou raciales » et « montrer des membres de ces communautés dans des rôles positifs ».Les eurodéputés ont également appelé à « accroître la responsabilisation des plateformes numériques et des réseaux sociaux afin de lutter contre la diffusion de l’incitation à la haine raciale à l’égard des migrants et des minorités », exigeant de fait plus de censure sur les réseaux sociaux.Le rapporteur du texte est Salima Yenbou, une eurodéputée française d’origine algérienne, née en Seine-Saint-Denis. Cette élue, issue du groupe des Verts mais ayant depuis rallié le camp macroniste, défendit son texte en déclarant :« Nous devons lutter activement contre le racisme, afin que nos filles et nos fils n’aient plus à se demander s’ils ont leur place dans notre société. Afin de construire un avenir meilleur, nous devons connaître et comprendre notre histoire. C’est pourquoi il est important que les étudiants en apprennent davantage sur le colonialisme, l’esclavage, le génocide et tous les phénomènes liés. »Elle ajouta qu’il fallait « mettre fin aux médias qui diffusent des propos racistes sur les migrants et les réfugiés, ainsi qu’aux contenus qui sont racistes, qu’ils soient intentionnels ou non. » La mission d’éliminer des contenus dits « racistes non intentionnels » donnerait à l’État de vastes compétences dans le domaine de la censure.

    Déseuropéaniser la culture et l’instruction

    Le texte complet exige de nombreuses autres mesures aboutissant à une sorte de racialisation radicale des politiques publiques. En effet, les eurodéputé exige que le « le coordinateur ‘antiracisme’ [de la Commission européenne] dispose de ressources adéquates et à ce que toutes les [Directions générales] contribuent à la prise en compte de l’égalité raciale dans l’ensemble des politiques de l’Union ».Les politiques éducatives et culturelles seraient particulièrement concernées. Les manuels scolaires doivent être réécrit afin de mentionner « des auteurs, des historiens, des scientifiques, des artistes et d’autres personnalités de races et d’origines ethniques variées ».Les programmes d’Hisoitre seraient modifiés par « une approche ciblée du passé des communautés raciales et ethniques vivant en Europe », mettant l’accent « sur les contributions des communautés racialisées au développement et à la construction de l’Europe d’aujourd’hui ».En outre, les eurodéputés exigent l’éradiation du « harcèlement à caractère raciste » dans les écoles. Mais on se demande bien qui en est la source !La racialisation éducative ne s’arrêterait pas au niveau scolaire. En effet, les États devraient mettre en place « des programmes pour l’apprentissage tout au long de la vie à destination des fonctionnaires, et notamment des forces de l’ordre, afin d’éliminer les comportements racistes et xénophobes ».Côté culture, le Parlement préconise le lancement d’initiatives « telles que des systèmes de bons ou des projets similaires, encourageant les personnes de différentes communautés raciales et ethniques à participer à des manifestations culturelles ». En bref des « chèques culture » visant les non blancs !En outre, on doit favoriser « la diversité au sein des institutions culturelles, tant au niveau des employés que de la direction, en fixant des critères permettant de recevoir des fonds publics et des conditions d’attribution de ces derniers ». Traduit en bon français : conditionner l’obtention de fonds publics sur la « discrimination positive » en faveur des non-blancs.Les acteurs culturels européens doivent se réorienter en faveur des allogènes et ainsi promouvoir « les langues, les cultures et l’histoire des minorités dans les programmes scolaires, les musées et les autres formes d’expression culturelle et historique » et soutenir « l’art et la culture des groupes racialisés et ethniques ». En bref, il s’agit déseuropéaniser l’enseignement de l’Histoire et la culture dans notre continent en faveur des traditions allogènes, essentiellement africaines et islamiques.

    Les Européens, boucs émissaires des échecs du multiculturalisme

    Le texte du Parlement contient également de nombreuses affirmations tendant à blâmer les Européens pour les échecs du multiculturalisme et les difficultés auxquelles font face les populations allogènes. En effet, on affirme que « le racisme existe dans tous les domaines de notre vie quotidienne » et que ce racisme « est profondément ancré dans la société et étroitement lié à ses racines culturelles, à son héritage et à ses normes sociales ».Le passé européen serait à l’origine des maux contemporains. Les eurodéputés affirment que « certains aspects de l’histoire européenne, notamment la colonisation, l’esclavage et les génocides, en particulier l’Holocauste, ainsi que d’autres manifestations de racisme, continuent d’avoir une incidence durable sur la société contemporaine ». Ces sujets doivent être « contextualisés [… ] en vue d’une meilleure compréhension des liens entre passé et présent ».
    Le législateur européen ne manque pas d’ailleurs d’une certaine schizophrénie concernant la diversité ethnique et ses problèmes connexes. Par exemple, il affirme que « les sociétés européennes accueillent une diversité culturelle de plus en plus importante et que les personnes nées à l’étranger et leurs descendants forment une part croissante de la population », ce qui revient à reconnaître l’existence du Grand Remplacement.En outre, le Parlement affirme que « la collecte de données de bonne qualité est l’un des moyens les plus efficaces d’analyser les problèmes sociaux, de manière quantitative comme qualitative, et qu’elle est essentielle pour concevoir, adapter, suivre et consolider des politiques publiques fondées sur des données probantes en réponse à ces problèmes ». On ne saurait être en désaccord, mais aura-t-on des données sur la criminalité, le recours à l’assistanat et les contributions fiscales ?Les données donnent tort aux chantres du vivre-ensemble et de la créolisation de l’Europe. En effet, les eurodéputés eux-mêmes reconnaissent que l’intelligence artificielle (IA) tend à être « discriminatoire ». Mais est-ce que cela serait dû aux préjugés des codeurs à la Silicon Valley – d’origine asiatique aussi souvent qu’européenne – ou simplement des données objectives qu’analyse l’IA ?Les analyses du Parlement européen sont autant de perles qui convergent vers un objectif clair : la démoralisation des Européens par la délégitimation de leur identité, le dénigrement de leurs réalisations historiques et l’attribution des échecs contemporains du multiculturalisme au passé honteux des Européens.​

    Hypocrisie et autoritarisme des mondialistes

    On ne soulignera jamais assez le caractère hypocrite des institutions mondialistes, se pavant du caractère « libéral » et « ouvert » de leur pouvoir, tout en étant profondément autoritaire.Le texte du Parlement en donne un exemple parfait. Il affirme que « la désinformation cible souvent des minorités et contribue à l’agitation sociale » et que « des médias indépendants et pluralistes qui promeuvent des récits équilibrés œuvrent en faveur de sociétés inclusives ». En outre, on doit instruire les jeunes afin qu’ils prennent « conscience des conséquences négatives de l’intolérance et […] développer leur esprit critique ».On veut imposer aux Européens la censure et un lavage de cerveau afin qu’ils ne puissent reconnaître les désavantages patents de l’immigration africaine et islamique – que ce soit en matière de criminalité, de recours à l’assistanat ou d’identité – et le régime se permet de chanter les louanges de « l’esprit critique » et des « médias pluralistes » !C’est que le régime ne tolère « l’esprit critique » et le « pluralisme » qu’à condition qu’un point de vue unique soit imposé : l’idéologie multiculturaliste, égalitariste et mondialiste. Cette hypocrisie au cœur du progressisme est révoltante.Le Parlement condamne les nationalistes qui chercheraient à « diviser nos sociétés ». Mais c’est chose faite : nos sociétés sont en effet profondément divisées du fait qu’elles ont perdu leur homogénéité ethnoculturelle et ne bénéficient plus d’une identité partagée.Aujourd’hui déjà, à peine la moitié des enfants nés en Belgique le sont de parents belgo-belges. Vraisemblablement un tiers, comme en France, sont d’origine africaine ou musulmane. Les tendances démographiques sont similaires dans toute l’Europe occidentale. Il faut remonter aux invasions barbares qui accompagnèrent la chute de l’Empire romain, voire aux conquêtes indo-européennes, pour constater un tel remplacement des populations indigènes du continent.En démocratie, les citoyens doivent pouvoir connaître les faits concernant les transformations de leur société. Plus encore, nos peuples doivent pouvoir décider du caractère démographique de leur société dans 10, 20 ou 100 ans. Le Parlement dit « européen » ne souhaite pas que les Européens puissent avoir connaissance des changements que subissent leurs nations, encore moins les dénoncer.Et on ne peut que regretter que l’adoption de ce texte par le Parlement ait été massive. Malgré ses clauses liberticides et son langage ahurissant, 495 eurodéputés ont voté en faveur de la résolution, 109 contre et 92 se sont abstenus. Ne possédant pas la liste des votes, on peut se demander si des eurodéputés prétendument conservateurs ont voté pour ce texte.Ce document établissant la position officielle du Parlement européen est un indicateur important de la wokisation des esprits au sein des institutions. Jusqu’à récemment, l’Union européenne s’était largement abstenue de militer sur les questions raciales. Le recrutement au sein de la fonction publique européenne se fait encore par le biais de tests de raisonnement, de fait des tests de quotient intellectuel (QI). Il est vrai que les gérants de ressources humaines ont commencé à s’offusquer de l’absence d’« individus racialisés » parmi les fonctionnaires.Ce n’est pas la première fois que les institutions effectuent de tels dérapages. Le Conseil de l’Europe a dû retirer une campagne qui affirmait, je traduis de l’affreux globish : « La beauté est dans la diversité comme la liberté est dans le hijab. »De même, la Commission européenne s’est vue contrainte de retirer ses « lignes directrices sur le langage inclusif », qui recommandaient de ne pas utiliser les expressions de « période de Noël » et « du fait de l’homme ». Les fonctionnaires européens avisèrent également de ne pas utiliser des prénoms comme « Marie et Jean » en tant qu’exemple, préférant « Malika et Julio ».Si la position du Parlement n’est pas contraignante, elle suggère la direction future des institutions européennes sur ces questions. La Commission européenne a récemment décidé d’enclencher le processus pour priver le gouvernement hongrois de fonds européens, malgré le fait que Viktor Orbán ait été fraîchement réélu avec 54 % des voix. Il ne fait pas de doute qu’il s’agit aussi d’une punition du gouvernement hongrois pour son orientation illibérale et patriote.L’UE a également décidé récemment d’interdire les médias russes dans le cadre de la guerre russo-ukrainienne. Le journaliste de Libération Jean Quatremer ne put cacher son émoi, déclarant : « La censure de RT et de Sputnik crée un dangereux précédent. » Il est probable que le tournant autoritaire et woke des institutions européennes entraînera des répercussions pour les nationalistes français et européens. Agissons en conséquence !
     
    Guillaume Durocher (Institut Iliade, 20 avril 2022)
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  • Les retombées géopolitiques de la guerre en Ukraine...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Patricia Lalonde, cueilli sur le site de Geopragma et consacré aux conséquences de la guerre russo-ukrainienne sur le paysage géopolitique mondial. Chercheuse à l’IPSE (Institut de Prospective et de Sécurité́ en Europe), Patricia Lalonde a succédé à Caroline Galactéros à la tête de Geopragma.

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    Les retombées géopolitiques de la guerre en Ukraine

    Les conséquences de la guerre des Russes en Ukraine sont innombrables : si les pays européens ont unanimement condamné l’intervention russe en Ukraine, il n’en est pas de même pour la plupart des pays du Moyen-Orient et de la sphère eurasiatique. 

    Après le refus de la Chine et de l’Inde de condamner l’opération militaire russe en Ukraine, il semblerait que les pays du Moyen-Orient tentent, eux aussi, d’éviter une brouille avec la Russie.

    Israël, soucieuse de ne pas froisser un pays avec lequel elle entretient de bonnes relations – grâce à l’importante communauté juive sur son sol – s’est dans un premier temps abstenu de condamner la Russie lors du vote aux Nations Unies, même si elle finira sous la forte pression américaine, par voter pour son retrait de la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies. Son Premier ministre Naftali Bennett proposera son aide pour une médiation entre la Russie et l’Ukraine, ce qui ne sera pas bien vu des côtés européen et américain. Néanmoins, malgré les remous politiques que la crise ukrainienne provoque dans le pays, les dirigeants israéliens savent qu’un accord avec le voisinage reste primordial pour la sécurité d’Israël.

    L’Invitation de Bachar el Assad par Mohamed Ben Zayed aux Emirats Arabes Unis reste sans doute l’acte le plus significatif d’une possible recomposition au Moyen-Orient.

    MBZ, qui a signé les accords d’Abraham à l’initiative de Donald Trump, pourrait chercher à devenir un facilitateur dans une prochaine réintégration de la Syrie dans le Conseil de Coopération du Golfe, espérant ainsi ouvrir la voie à un possible futur nouveau Levant.

    La visite du ministre des Affaires étrangères du Barheïn à Sergueï Lavrov, son homologue russe à Moscou ainsi que les accords diplomatiques et économiques qui s’en est scellés participent à ce remodelage.
    Le président turc, R. T. Erdogan, politiquement mis à mal dans son pays, tout en restant un pilier de l’OTAN, joue sur plusieurs tableaux, après s’être rapproché d’Israël, il cherche également à se réconcilier avec Damas. Il prend une place centrale dans les négociations qu’il héberge à Istanbul entre l’Ukraine et la Russie comme il l’a fait lors des négociations d’Astana sur le conflit syrien ou encore sur le conflit du Haut Karabakh ; son rapprochement avec Damas et avec Israël pourrait également participer à ce jeu de chaises musicales au Moyen-Orient.

    Il semblerait que l’alliance des pays occidentaux avec les États-Unis contre la Russie ait effrayé tous ceux qui gardent et cherchent à avoir de bonnes relations avec elle.

    La façon dont l’Amérique de Joe Biden a lâché les Afghans (en laissant le pays revenir au Moyen Âge), son incapacité à faire stopper la guerre au Yémen provoquant les attaques des Houthis sur les sols saoudien et émirati ont fait la démonstration pour bon nombre de pays de la région qu’il était dangereux de mettre tous leurs œufs dans le même panier, sous la protection de l’oncle Sam… C’est ainsi que Mohamed Ben Salmane vient d’obliger le président du Yémen en exil Mansour Hadi à démissionner dans une énième tentative de paix, en donnant la gestion des affaires à un conseil présidentiel. S’il n’est pas certain que les Houthis en accepteront toutes les conséquences, le besoin urgent d’aide humanitaire de l’ouverture de l’aéroport de Sanaa et du port d’Hodeïda, pourrait les pousser à au moins accepter d’entamer de véritables négociations. L’avenir de la sécurité au Moyen-Orient ne pouvant plus reposer sur les Américains, de nouvelles dispositions doivent être prises au niveau régional. 

    S’il fallait une autre preuve, le refus des Algériens à Doha lors du Forum des Pays exportateurs de gaz (GECF) de livrer du gaz à certains pays européens, excepté à l’Italie, en serait une autre démonstration.

    L’évolution de la dynamique du pouvoir mondial et des pratiques régionales réoriente rapidement de nombreux États du Moyen-Orient qui préfèrent s’éloigner de Washington par peur.

    L’Iran sous sanctions américaines cherche également à jouer un rôle et à apaiser les tensions régionales entre les partisans des accords d’Abraham et ceux qui ne veulent en entendre parler.

    À cause de la guerre en Ukraine, les négociations sur le nucléaire iranien ont pris du retard. La Russie, important négociateur sur le JCPOA, a en effet réclamé que les nouvelles sanctions appliquées par les Américains depuis l’invasion russe en Ukraine, ne le soient pas en ce qui concerne son commerce avec l’Iran, laissant ainsi aux Américains, comme ultime moyen de pression sur les Iraniens, la menace de laisser les Gardiens de la Révolution sur leur liste terroriste.  

    En Asie centrale, la rencontre et le soutien du Premier ministre Pakistanais Imran Khan avec Vladimir Poutine, ainsi que son refus d’accepter l’implantation de bases militaires américaines sur son sol, ont fortement déplu aux Américains. Il est vrai que le rapprochement que le Pakistan a opéré avec la Chine et son soutien à la « Belt and Road Initiative » dont le port de Gwadar au Balouchistan doit faire partie, avait déjà commencé à envenimer les relations entre les deux pays. Imran Khan vient d’être destitué dans ce qui semble être un coup d’État imposé aux militaires pakistanais par les Américains. De graves troubles dans le pays sont à craindre, risquant s’il en était encore possible de déstabiliser le voisin afghan.

    Enfin, la réunion organisée par le ministre des Affaires étrangères chinois avec ses homologues d’Asie Centrale dans la province d’Anthui en Chine afin de se mettre d’accord sur une position commune sur le conflit Ukraine Russie,  ainsi que  les accords commerciaux et diplomatiques qui s’en sont suivis, montrent qu’une nouvelle organisation géopolitique du monde est en marche.

    Pas sûr que les appels téléphoniques de Joe Biden au président indien, Narendra Modi ainsi qu’à Cyril Ramaphosa, son homologue de l’Afrique du Sud pour avoir une explication sur leur abstention sur le vote pour évincer la Russie de la CNDH ne puissent empêcher ce bouleversement géopolitique. 

    Pas sûr non plus, que l’insistance des Américains à vouloir prolonger la guerre et à livrer des armes lourdes à l’Ukraine ne constitue pas un énorme risque pour l’Europe.

    Patricia Lalonde (Geopragma, 18 avril 2022)

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  • «Prétendre que l'invasion de l'Ukraine accélère la construction européenne est un contresens»...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Guillaume Bigot, cueilli sur le Figaro Vox et consacré au prétendu réveil stratégique de l'Union européenne provoqué par la guerre en Ukraine. Politologue et essayiste, Guillaume Bigot est l'auteur de La Populophobie - Le gouvernement de l’élite, par l’élite et pour l’élite (Plon, 2020).

     

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    Guillaume Bigot: «Prétendre que l'invasion de l'Ukraine accélère la construction européenne est un contresens»

    «Nous sommes pareils à des voyageurs de wagons-lits qui ne se réveilleront qu'au moment de la collision» écrivait Robert Musil à propos de la première guerre mondiale dans L'Europe désemparée.

    Plus d'un siècle plus tard, les Européens ne sont pas moins surpris par le retour de la guerre de haute intensité comme disent les spécialistes. En réaction à l'invasion de l'Ukraine, l'Union européenne (UE) serait en train de sortir de sa torpeur stratégique. On assisterait à l'émergence d'une authentique volonté d'autonomie stratégique continentale. Et ceci pour trois raisons brandies par les partisans de la construction européenne : une raison sentimentale, une raison énergétique et une raison militaire dont chacune mérite d'être examinée.

    La raison sentimentale a été formulée par Ursula von der Leyen: « Les Ukrainiens font partie de nous. Ils sont des nôtres et nous souhaitons qu'ils nous rejoignent. » Nous sommes tous ukrainiens répète-t-on à Bruxelles et cette communauté de destin a été renforcée par la demande d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne. La découverte de charniers laissés par les soudards impitoyables de l'armée russe dans la banlieue de Kiev ne peut que renforcer la sympathie naturelle des Européens pour les Ukrainiens.
    La cruauté de l'agression russe serait ressentie comme celle de tous les Européens, une sorte d'affectio societatis continental sera en train d'émerger.

    Or, dans l'histoire, on ne se pose qu'on s'opposant. La France n'est devenue elle-même qu'en combattant les Anglais pendant la guerre de Cent ans. Plus décisif encore, un sentiment d'insécurité collective continentale aurait fait naître la résolution des Européens de se défendre contre la Russie poutinienne, ennemi commun de l'UE et de ses valeurs.

    En examinant cet argument sentimental, on est cependant frappé par sa fragilité. D'abord, la guerre russo-ukrainienne est intra-européenne. Les Ukrainiens sont européens mais les Russes ne le sont pas moins. Les Grecs attaqués à Chypre par des Turcs non européens et membres de l'Otan, étaient aussi européens. Les
    Serbes bombardés par l'Otan étaient également européens. Si l'UE se sent aujourd'hui ukrainienne alors qu'elle ne s'est jamais sentie serbe ou grecque, c'est que l'Ukraine est une nation européenne pro-Otan attaquée par un autre pays européen anti-Otan.

    C'est d'ailleurs ce que Madame von der Leyen confirme en expliquant qu'en Ukraine : "c'est la démocratie qui se dresse contre l'autocratie et dans ce combat-là, nous sommes unis avec nos amis canadiens et américains. »

    Passons au deuxième argument de ceux qui affirment que l'UE aurait pris en main ses intérêts stratégiques à l'occasion de la guerre en Ukraine, c'est l'argument énergétique. Tous les Européens seraient réunis, nous dit-on, par la recherche d'une résilience énergétique. « La guerre d'agression russe en Ukraine nous montre de manière dramatique à quel point la sécurité et l'approvisionnement énergétique sont étroitement liés. Nous ne pouvons-nous permettre d'ignorer cela », reconnaît Patrick Graïchen, le secrétaire d'État allemand au climat. La présidente von der Leyen abonde dans le même sens : « Les 27 sont bien trop dépendants aux énergies fossiles russes, et il faut nous débarrasser de cette dépendance. »

    Constats difficilement contestables mais incitent-ils les Européens à développer une vision commune de leur indépendance énergétique ? Le diagnostic est partagé, les remèdes le sont moins.

    Et pour commencer, les sanctions européennes contournent les banques impliquées dans les transactions avec Gazprom. Le gaz et le pétrole russes continuent d'arriver en Europe. Face à l'ignominie des crimes commis par les soudards russes, l'UE vient de renoncer au charbon russe. C'est un dérisoire volontarisme de sauts de puces. L'indépendance énergétique demeure ainsi une velléité.
    La filière nucléaire française offre une solution, peut-être pas immédiate mais au moins compatible avec un objectif d'autonomie énergétique européenne. Pourtant, le plan de relance européen exclut le nucléaire.

    En revanche, la présidente de la Commission a déclaré que nous devons nous tourner vers "nos amis américains pour voir s'il n'est pas possible de disposer de davantage de gaz naturel liquéfié".
    L'intérêt des 27 étaient-ils de se passer de Nord Stream II pour se jeter dans les bras du Qatar ou du Texas afin de se fournir en énergie ? Joseph Biden a répondu à cette question lors de sa conférence de presse avec le chancelier allemand, le 7 février dernier, en déclarant : « si la Russie envahit l'Ukraine, Nord Stream II ne se fera pas. »

    Enfin, le troisième argument de ceux qui voient dans la crise ukrainienne l'acte de naissance d'une Europe puissance, c'est que la question militaire intéresserait enfin Bruxelles.

    « La guerre a enfin contribué à créer le consensus autour de la défense européenne » analyse Nathalie Loiseau, eurodéputé et présidente de la sous-commission défense au Parlement européen. « Pour la première fois de notre histoire, nous finançons l'achat et la livraison d'armes à un pays attaqué avec des fonds européens » explique Ursula von der Leyen. Pour le Haut représentant Josep Borrell, l'adoption par le Conseil européen d'un
    texte de doctrine défensive intitulé « boussole stratégique » exprimerait un « changement tectonique. »

    Autre signe que les Européens auraient renoncé à leur naïveté : l'Allemagne a décidé de consacrer 100 milliards d'euros à sa défense. Pourtant, ici encore, on est loin de tenir les preuves d'une authentique volonté d'autonomie stratégique européenne. Effectivement, l'UE va fournir une aide militaire mais ce sont les États membres qui l'ont décidé et ce sont les Etats membres qui livreront, le tout avec la bénédiction et sous la supervision de l'Otan.

    Quant au réarmement de l'Allemagne, il n'exprime aucune solidarité européenne. Berlin a commencé à s'équiper en achetant des F35 américains, compatibles avec les standards Otan et habilités à porter des charges nucléaires américaines… Pour l'autonomie stratégique continentale, on repassera.

    Dans l'affaire Aukus, Allemands et Suédois ont réalisé un intense lobbying intensif pour que Canberra n'achète pas de sous-marins français. En matière spatiale, les sociétés allemandes préfèrent Space X à Ariane 6. La maxime gaullienne se vérifie ad nauseam : les États n'ont pas d'amis… Même les États membres n'ont que des intérêts.

    D'ailleurs, la « boussole stratégique » appelle à une « coopération plus étroite et mutuellement bénéfique avec les États-Unis. » Nathalie Loiseau confirme que cette fameuse boussole européenne ne change pas de cap : « Il faut arrêter de penser qu'autonomie stratégique et lien transatlantique sont contradictoires. » Au-delà de confirmer la prophétie gaulliste d'une Union européenne qui ne
    pourrait se réaliser qu'au profit d'une tierce puissance, deux évidences devraient nous sauter aux yeux.

    La première évidence, c'est que la crise ukrainienne signe le retour de la guerre. Or, le plus authentique cri de guerre des Européens, c'est Aristide Briand qui l'a poussé en 1926: « Arrière les fusils, les mitrailleuses, les canons ! Place à la conciliation, à l'arbitrage, à la paix! » Le projet européen est tout entier fondé sur l'espoir de neutraliser la guerre par l'économie. Pourtant, l'UE commerce davantage avec la Russie qu'avec l'Ukraine.

    C'est parce qu'elles ne veulent plus se défendre elles-mêmes que les nations se sont abandonnées au projet européen. C'est aussi pour cette raison que l'UE est consubstantiellement liée à l'Otan. Les Européens n'ont plus ni la capacité, ni la volonté de se défendre eux-mêmes alors comment les 27 trouveraient-ils le ressort de défendre une entité commune ? Les volontés se multiplient, les renoncements s'annulent. La crise ukrainienne, c'est aussi le retour des nations.

    Il y a un peuple allemand et un peuple français. Il y a un peuple ukrainien et un peuple russe et sans doute les Ukrainiens sont-ils plus proches des Russes que nous ne le sommes des Allemands.
    Les Ukrainiens se battent pour leur terre, pour défendre leurs frontières et pour leur drapeau. Les Ukrainiens sont un peuple mais les Européens ne le sont pas. D'ailleurs, qui irait mourir pour le drapeau européen ?

    On voit plus de drapeaux ukrainiens dans les beaux quartiers parisiens aux fenêtres que de tricolores au lendemain de Charlie, comme si les bobos français avaient besoin d'un patriotisme de substitution. Le bleu et le jaune du drapeau ukrainien ne sont pas les couleurs d'un patriotisme post-national qui aurait moralement réarmé ceux qui posaient des bougies après le Bataclan en bêlant : vous n'aurez pas ma haine !

    La résistance héroïque des Ukrainiens montre par ailleurs que ce n'est pas la taille d'un pays mais la détermination de son peuple à le défendre qui fonde son indépendance. La Suisse est petite mais personne n'ira l'envahir car le patriotisme helvète est ombrageux et armé !

    Platon savait déjà que ce ne sont pas les murs qui font les cités mais le courage des hommes qui les défendent. Prétendre que l'invasion de l'Ukraine accélérerait la construction européenne revient ainsi à tomber dans un grave contresens.

    Guillaume Bigot (Figaro Vox, 8 avril 2022)

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  • «L'Union européenne se révèle incapable de défendre ses frontières»...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Max-Erwann Gastineau au Figaro Vox et consacré à la protection des frontières de l'Union européenne.  Diplômé en histoire et en science politique, Max-Erwann Gastineau est essayiste et a publié Le Nouveau procès de l'Est (Éditions du Cerf, 2019).

     

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    Construction du mur en Pologne: «L'Union européenne se révèle incapable de défendre ses frontières»

    FIGAROVOX. - Le Parlement polonais a donné vendredi son feu vert définitif au projet gouvernemental de construction d'un mur à la frontière avec la Biélorussie pour empêcher les migrants et les réfugiés de passer en Pologne. Est-ce la seule solution pour ce pays membre de l'Union européenne ?

    Max-Erwann GASTINEAU. - Le 7 octobre dernier, les ministres de l'Intérieur de douze pays membres, dont la Pologne, l'Autriche, le Danemark ou la Grèce, appelaient l'Union européenne à changer radicalement de philosophie en matière migratoire. Appel adressé, sous un double prisme sécuritaire (sécurité culturelle et frontalière), aux commissaires Margaritis Schinas, chargé de la Promotion de notre mode de vie européen, et Ylva Johansson, chargée des Affaires intérieures. En juin 2020, la Commissaire suédoise décrivait comme «crucial d'ouvrir autant de voies de migration légales que possible», et ce pour des raisons d'ordre non seulement humanitaire, afin de contrer le développement des réseaux de passeurs, mais également économique, en vue de répondre au vieillissement de la population européenne : «chaque année, affirmait-elle dans un entretien accordé au journal La Croix, plus de deux millions de migrants rejoignent l'UE légalement. Cela fonctionne très bien, et je voudrais voir cette part augmenter.»

    Prisme culturel et sécuritaire d'un côté ; prisme humanitaire et économique de l'autre… On ne saurait mieux résumer la nature idéologique du mur d'incompréhensions qui, depuis des années, divise l'Europe et soumet ses instances dirigeantes aux pesanteurs d'un «humanitarisme total», selon l'expression ici formulée par Donald Tusk, ancien président du Conseil européen de 2014 à 2019.

    La décision de Varsovie de construire un mur à sa frontière orientale, quelques mois après les débuts de la crise biélorusse, est une réponse à ce mur idéologique, témoin de notre impuissance collective. Elle révèle un terrible échec ; celui de l'Union européenne à réaliser la promesse induite par la création de l'espace Schengen en 1997 : substituer aux frontières intérieures de l'Europe l'institution et la défense de frontières extérieures «communes» aux États membres.

    Si l'Union européenne s'est montrée incapable de défendre ses frontières, et d'apporter une aide matérielle à la Pologne, qui depuis août nous alerte sur la situation migratoire à sa frontière orientale, ce n'est pas en raison d'un défaut de compétences ni même de moyens (le budget de Frontex est passé de 114 millions d'euros en 2015 à 460 millions en 2020 et 544 millions en 2021), bien que l'on puisse juger ces derniers encore insuffisants. Mais en raison d'un défaut de fins, d'accord et de clarté sur les finalités du projet européen.

    Quelles fins l'Union européenne poursuit-elle ? Se pense-t-elle comme une entité politique en devenir, capable d'agir en complément, voire en supplément des États, jusqu'à assumer le corollaire de cette prétention : l'emploi de la contrainte pour défendre ses frontières ? Ou est-elle condamnée à n'être que le dernier visage d'une utopie née après la chute du mur de Berlin, indifférente à l'histoire et à la géographie, purement procédurale, antipolitique, autorégulée par des dispositifs juridiques et techniques, tels que ceux appelés à accélérer l'uniformisation des règles nationales d'asile ou la mise en œuvre de mécanismes de répartition automatique des réfugiés ? Derrière la construction du mur polonais, c'est l'avenir et le sens de la construction européenne qui se jouent.

    Ce mur participera-t-il à régler la crise migratoire ? Est-ce viable ?

    Ce mur ne saurait, à lui seul, répondre au défi migratoire, qui concerne d'ailleurs bien plus le sud - des côtes méditerranéennes espagnoles aux portes maritimes des Balkans - que la frontière orientale polonaise. Il envoie cependant un message clair aux instances européennes et aux États de l'Ouest, en leur rappelant qu'ils ne sauraient plus longtemps réprouver les conséquences de leur apathie.

    En mettant l'UE au pied du mur, le mur polonais pourrait, en outre, ouvrir un espace propice à l'avancement de l'agenda «migratoire» européen. On le voit avec Emmanuel Macron qui, après avoir rencontré le chef de gouvernement hongrois et meilleur allié de la Pologne, Viktor Orban, a annoncé vouloir profiter de la présidence française de l'UE pour organiser «une politique cohérente de maîtrise de nos frontières extérieures».

    La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a déclaré que l'Union ne financerait pas la construction de barrières aux frontières de l'UE. Comprenez-vous le statu quo de l'Union européenne sur ce sujet ?

    Dans l'Europe des droits de l'homme, la frontière n'est pas une norme mais une anomalie, une sorte de concession faite à la réalité honnie des nations. La fin de non-recevoir opposée par Ursula von der Leyen à la Pologne nous le rappelle avec force : l'UE a moins le souci de protéger ses frontières que de dépassionner la question, via la mise en place d'une meilleure répartition de la «charge» migratoire. Comme si la question était d'abord de parvenir à contenir la colère des peuples et non d'en ralentir la cause : l'intensité des flux migratoires et l'angoisse existentielle qu'elle nourrit, inspirée d'un constat qu'Angela Merkel et Nicolas Sarkozy avaient su poser en 2010, à défaut d'en conjurer les effets : «l'échec du multiculturalisme».

    Le grand philosophe libéral américain, Michael Waltzer, nous prévenait : «abattre les murs de l'État (…) ce n'est pas créer un monde sans mur mais plutôt créer un millier de petites forteresses». La Pologne ne veut pas faire de l'Europe une forteresse ; elle veut éviter de les multiplier. Elle veut échapper au destin multiculturel de l'Ouest, rester une nation libre d'apprécier ce qui distingue l'ici de l'ailleurs. Comment lui reprocher, aujourd'hui, le fait de tirer toutes les conséquences de nos atermoiements passés ?

    Au lieu de promouvoir de nouveaux mécanismes de relocalisation, l'UE doit créer la possibilité de renvoyer les migrants illégaux vers leurs points de départ et d'y traiter leurs demandes d'asile. La différenciation entre les migrants qui ont réellement besoin de protection internationale et les migrants économiques sera cruciale, si l'on veut sauver le droit d'asile de son dévoiement et s'assurer que seuls ceux qui ont réellement besoin de protection entrent sur le territoire européen.

    Les Nations unies ont demandé une action urgente pour sauver des vies et éviter des souffrances à la frontière entre l'UE et la Biélorussie, après la mort de plusieurs demandeurs d'asile. Une intervention de l'UE aurait-elle permis d'éviter ces drames ?

    Difficile de le dire, tant l'impuissance de l'UE est patente. Une chose est sûre : pour éviter de nouveaux drames, nous devrons changer de logiciel. En juin 2018, un accord sur l'immigration conclu par les chefs d'État et de gouvernement avait soutenu l'idée formulée par le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCNUR) de créer des «plates-formes de débarquement» hors de l'UE. Une mesure qui rappelle le programme «Operation Sovereign Border» (Opération Frontières souveraines) lancé par l'Australie en 2013. Programme dont l'objectif visait à intercepter les bateaux de migrants voguant à leur péril, pour les conduire dans des centres de transit installés sur les îles voisines de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Le tout en échange de contreparties financières, telles que celles aujourd'hui fournies par l'UE à la Turquie, et demain à d'autres pays de transit, tels que l'Iran ou le Pakistan ? La question mérite d'être posée.

    En joignant le geste à la parole, l'Australie a su préserver ses frontières et sauver des vies. L'UE le peut-elle ? Dans des arrêts de mai et de décembre 2020, la Cour de Justice de l'UE (CJUE) condamnait la Hongrie pour remise en cause de la directive «retour», interdisant le refoulement des migrants entrés en situation irrégulière (afin qu'ils puissent faire valoir leur droit à déposer une demande d'asile), et l'institution de zones de transit en Serbie, rendant de fait impossible la protection effective des frontières de l'UE.

    Le primat des droits de l'individu sur les impératifs de souveraineté et de sauvegarde du «droit à l'identité nationale», que le juge hongrois a dernièrement tenté d'opposer au juge européen, est le produit d'un processus historique étranger à la démocratie australienne… Mais pourrons-nous encore longtemps préférer les droits aux murs sans questionner les effets sclérosants de l'extension continue du carcan jurisprudentiel européen ?

    Faut-il renforcer la présence de l'OTAN dans cette partie de l'Europe ?

    Si l'Union européenne veut, demain, exister sur la scène internationale, elle devra se doter d'une pensée géopolitique propre. Pas d'indépendance politique sans autonomie de pensée. Mais y aspire-t-elle seulement ? N'oublions jamais que les États ont la politique de leur géographie et que la nature fondamentalement anarchique du système internationale les invite, en permanence, à maximiser les conditions de leur propre sécurité. Si la Pologne, à l'image d'autres nations de l'Est, comme les nations baltes, n'a aucune raison objective de se priver de la protection américaine que lui fournit l'OTAN, la question se pose différemment pour la France.

    La présence toujours plus forte de l'OTAN à l'est de l'Europe est-elle de nature à renforcer notre sécurité collective ou, au contraire, à force d'insécuriser notre incontournable voisin russe, prépare-t-elle l'avènement de futures crises - énergétiques, migratoires, voire militaires ?

    L'UE doit d'urgence repenser son rapport à l'OTAN et tirer toutes les conséquences que son absence d'autonomie fait peser sur sa sécurité et ses relations extérieures. Mais comme ce sursaut «réaliste» a, dans les faits, peu de chances de se produire, je dirais que seul le retour d'une France forte, capable de développer une diplomatie propre, débarrassée des œillères que lui impose l'atlantisme ordinaire des élites européennes, pourra poser les termes d'une autre voie pour l'Europe dans le rapport plus serein qu'elle doit désormais construire avec ses voisins orientaux.

    «Le continent européen ne sera jamais stable, ne sera jamais en sécurité, si nous ne pacifions pas et ne clarifions pas nos relations avec la Russie», déclarait à la conférence des Ambassadeurs d'août 2019 le président Emmanuel Macron. Reste à passer des mots aux actes, comme sur l'immigration.

    Max-Erwann Gastineau, propos recueillis

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