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union européenne - Page 3

  • Quelle souveraineté pour l’Europe ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Georges Castro cueilli sur Polémia et consacré à la question de la souveraineté européenne. Georges Castro est responsable commercial au sein d’une entreprise industrielle française à caractère stratégique.

     

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    Quelle souveraineté pour l’Europe ?

    Le conflit ukrainien est synonyme de séisme pour notre continent. S’il a rappelé à bon nombre d’Européens que la fin de l’Histoire n’était que chimère, son onde de choc dans les domaines politiques et industriels sera sans doute colossale. Nous avions précédemment évoqué les conséquences désastreuses [1] des sanctions et du virage énergétique entrepris par l’Union Européenne en réaction à l’invasion russe. Leurs effets commencent à se matérialiser outre-Rhin, avec une récession anticipée pour 2023 [2]. Cette guerre nous en dit aussi beaucoup en termes de grande politique et fait apparaître une Europe plus que jamais divisée sur des sujets pourtant majeurs tels que la Défense, l’approvisionnement énergétique ou encore l’idée même de souveraineté et sa mise en œuvre.

    Le retour d’ambitions politiques assumées pour l’Allemagne, mais sous parapluie étasunien

    C’est une nouvelle donnée majeure dans la géopolitique européenne contemporaine : l’Allemagne réarme… et cette initiative est saluée dans bon nombre de pays de l’Est, à commencer par les États baltes, qui ont pourtant subi maintes fois dans l’Histoire les conséquences des ambitions expansionnistes prussiennes puis allemandes. La création, fort commentée, d’un fonds spécial de cent milliards d’euros pour combler les lacunes capacitaires de la Bundeswehr doit permettre à Olaf Scholz de faire de l’Allemagne « la force armée la mieux équipée d’Europe ». « En tant que nation la plus peuplée, dotée de la plus grand puissance économique et située au centre du continent, notre armée doit devenir le pilier de la défense conventionnelle en Europe » ajoute le chancelier. Des propos sans précédent depuis 1945, qui pourraient donner des frissons à qui garde en tête que l’Allemagne fut à l’origine des deux conflits mondiaux qui ont ravagé l’Europe. Mais laissons de côté ces considérations de Cassandre. Ce fonds pourrait représenter une aubaine pour enfin faire éclore une défense européenne et nourrir l’industrie qui serait à même de l’alimenter.

    Il n’en sera rien. L’Allemagne poursuit dans la ligne qui est la sienne depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale : elle privilégie la relation étasunienne. Et le chancelier d’annoncer l’achat d’équipements militaires sur étagère, faisant fi des programmes de coopération en cours avec la France. Ainsi le projet d’avion de chasse du futur franco-allemand prend du plomb dans l’aile avec les annonces berlinoises de se tourner vers l’acquisition du F-35 américain. Dans un domaine aussi fondamental que celui de la défense sol-air, l’Allemagne entend là-aussi s’appuyer sur les États-Unis, mais aussi sur Israël. Lors d’un discours à Prague, Olaf Scholz n’a pas daigné mentionner la coopération avec la France dans le domaine de la défense. Il s’est éloigné de la ligne de l’Élysée (qui préconisait de relancer l’Europe en se fondant sur un « noyau dur » de pays pour avancer plus vite sur certains sujets) en envisageant un élargissement oriental de l’UE à 30 voire 36 membres [3].

    L’Allemagne renoue ainsi avec ses ambitions sur une Mitteleuropa qu’elle influence déjà par sa masse commerciale et industrielle et qu’elle entend fédérer maintenant autour d’aspects sécuritaires. Citons ici l’initiative de l’European Sky Shield, portée par Berlin au sein de l’OTAN, rassemblant 14 pays européens [4] autour d’un bouclier anti-aérien dont les systèmes de missiles mis en œuvre seraient allemands, américains et israéliens. La France et l’Italie, qui partagent des expertises inégalées dans ce domaine, demeurent étrangères à ce projet.

    L’autonomie européenne en matière de défense, ce n’est donc pas pour demain. L’Allemagne joue sa partition : lorgne vers l’Est, mais mise gros sur sa relation avec Washington, ce qui ne va pas forcément dans le sens d’une Europe souveraine.

    La Pologne se construit en puissance régionale avec l’appui d’acteurs tiers au continent européen

    Les ambitions politiques retrouvées de l’Allemagne ne remportent cependant pas l’unanimité à l’Est. La Pologne s’oppose fermement à Berlin sur deux points : l’intégration européenne (Varsovie défendant une conception proche d’une Europe des Nations face à un fédéralisme prôné par Berlin) et la politique affichée vis-à-vis de la Russie (dont l’Allemagne avait fait son principal pourvoyeur d’énergie). Les relations entre Berlin et Varsovie demeurent alors complexes et ambivalentes à l’heure où la Pologne apparaît comme un nouveau pôle de puissance sur le continent.

    Tout d’abord, elle est à l’origine de l’Initiative des Trois Mers, que le Président Duda décrivait en 2016 comme « un nouveau concept pour promouvoir l’unité de l’Europe et sa cohésion ». Rassemblant douze pays situés entre les mers Adriatique, Baltique et Noire, ce nouveau centre de gravité voulait marquer son indépendance vis-à-vis de Bruxelles, Paris ou Berlin.

    Varsovie, par ce biais, ne fait que renouer avec sa politique d’entre-deux guerres, à savoir celle de la Miedzymorze, l’Intermarium : la création d’une confédération menée par la Pologne afin de contrebalancer l’influence de l’Allemagne et de la Russie en Europe orientale en favorisant le patronage d’un acteur tiers. Dans les années 1920-30, cet acteur fut la France. Au grand dam de l’Europe, cet acteur est aujourd’hui l’inévitable Washington.

    Car la Pologne, historiquement déçue par l’Europe de l’Ouest, a franchement fait le choix du parapluie américain. Les achats de matériels militaires et de plateformes de premier rang auprès des États-Unis se chiffrent en dizaine de milliards d’euros depuis dix ans. La Pologne se fournit aussi en capacités de défense auprès d’Israël, de la Corée, du Royaume-Uni, ignorant systématiquement les offres européennes et françaises. Elle sera dotée d’une armée conventionnelle qui à terme sera parmi les toutes premières du continent, mais dont les capacités matérielles seront fournies par des États complètement étranger à celui-ci [5].

    Dans le domaine de l’énergie, fermement orientée vers le gaz naturel liquéfié, la Pologne a récemment fait le choix de l’américain Westinghouse pour bâtir sa première centrale nucléaire, sans considérer EDF.

    S’affranchissant ainsi du fonctionnaire bruxellois pour mieux embrasser l’aigle étasunien, Varsovie ne fait finalement que tomber de Charybde en Scylla, remettant la souveraineté reprise au premier dans les serres du second.

    La Hongrie, ne pas rompre avec Moscou, au risque de s’isoler dans l’Union Européenne

    En termes d’autonomie, la Hongrie a fait fort. Viktor Orbán et son Fidesz n’ont jamais cédé aux sirènes européennes de l’immigration bien heureuse. Défenseurs de valeurs traditionnelles et d’une vision classique de la famille, ils ont sans cesse lutté contre les influences des lobbys LGBT et globalistes, parmi lesquels la fondation Soros. Surtout, concernant l’Ukraine, Budapest n’a ni livré d’armes à Kiev, ni suivi la politique de sanctions prônée par l’UE envers Moscou. La raison est simple : la Hongrie importe 65% de son pétrole et 80% de son gaz depuis la Russie. Couper ces approvisionnements radicalement, sans parade de court terme, ce serait saigner à blanc une industrie qui représente 24% du PIB hongrois et mettre encore plus à mal une population déjà touchée par des taux d’inflation en hausse exponentielle.

    La raison d’État l’emportant, Viktor Orbán a fait un choix des plus souverains en ne s’alignant pas sur Bruxelles, en maintenant des relations stables avec Moscou, afin de protéger les intérêts de son pays. Pragmatique Hongrie qui s’emploie à demeurer attractive pour l’industrie lourde bavaroise (qui va puiser en terre magyare une main d’œuvre qualifiée et bon marché), ne rechigne pas à contracter avec le Turc en matière de défense, partage la ligne d’un Emmanuel Macron quand il s’agit de promouvoir une souveraineté européenne et miser sur le nucléaire [6].

    Autonome, ce pays agit selon ses intérêts. Il apparaît pourtant bien isolé sur notre continent, sa relation avec Moscou demeurant difficilement acceptable pour ses voisins polonais notamment.

    L’Europe éclatée

    Par ces quelques exemples, nous souhaitions souligner l’éclatement de l’Europe en matière de souveraineté, d’autonomie.

    S’il est naturel, pour les nations, de suivre avant tout leurs intérêts, le conflit ukrainien consacre un peu plus l’absence de « communauté » européenne. L’Allemagne, la Pologne, la Hongrie… mais aussi l’Espagne ou encore le Portugal avancent avec leur agenda particulier. Hélas celui-ci rime souvent avec le maintien, sinon le renforcement d’une vassalisation au bénéfice des États-Unis ou au moins à un alignement avec leurs intérêts.

    L’autonomie, ce vieux concept légué des Grecs anciens, qui désigne le fait de se gouverner sans tutelle tierce, est un concept qui semble avoir périclité sur notre continent, alors même qu’il fut le moteur anthropologique de l’Européen, la sève qui permit son rayonnement mondial.

    Or aujourd’hui, des domaines fondamentaux comme la défense, l’énergie, l’industrie échappent volontairement à un contrôle continental. L’Européen s’en remet à l’Américain, oubliant que ce dernier n’a pas les mêmes intérêts que lui, n’est pas de la même civilisation, ne partage pas la même géographie.

    Une situation insupportable pour qui voit dans l’Europe autre chose qu’un marché commun et qu’un espace Schengen laissant libre circulation aux marchandises, aux capitaux et aux personnes.

    Georges Castro (Polémia, 16 novembre 2022)

     

    Notes :

    [1]« Ukraine, énergie et industrie… Où sont les intérêts de la France ? », Polémia, Georges Castro, disponible sur https://www.polemia.com/ukraine-energie-et-industrie-ou-sont-les-interets-de-la-france/
    [2] 0.4% de récession attendue pour 2023, « Le grand malaise de l’industrie allemande », Le Figaro, Pierre Avril, 13 octobre 2022.
    [3] « Dans un virage stratégique, Berlin s’éloigne de Paris », Le Figaro, Pierre Avril, 24 octobre 2022
    [4] Allemagne, Royaume-Uni, Slovaquie, Norvège, Lettonie, Estonie, Hongrie, Bulgarie, Belgique, République tchèque, Lituanie, Pays-Bas, Roumanie, Slovénie, Finlande
    [5] « Le réarmement massif de la Pologne : causes, conséquences et controverses », The conversation, Frédéric Zalewski, 6 octobre 2022, disponible sur : https://theconversation.com/le-rearmement-massif-de-la-pologne-causes-consequences-et-controverses-191705
    [6] « Macron et Orbán  affichent des intérêts communs sur l’Europe », Les Échos, Catherine Chatignoux, 13 décembre 2021, disponible sur : https://www.lesechos.fr/monde/europe/macron-et-orban-trouvent-des-sujets-dinteret-commun-1372211

     
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  • Green Deal et escroquerie écologique...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son site personnel et consacré au "green deal" de l'Union européenne...

    Économiste de formation et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Il a également publié un manifeste localiste intitulé Chez nous ! - Pour en finir avec une économie totalitaire (La Nouvelle Librairie, 2022).

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    Green Deal et escroquerie écologique

    Dans la pensée magique qui habite le Parlement européen, les bonnes intentions dispensent chacun de s’interroger sur les conséquences de ses votes. Nul n’est jamais jugé sur autre chose que ses intentions ! — et au nom du verdissement, tout est permis. Chacun appréciera les effets contrastés de cette dispense du réel, qui ne dure jamais bien longtemps. Dans la fureur verte qui habite la Commission, s’étend à la Banque centrale, et emporte le Parlement à rebours de la science qu’est l’écologie, rien n’est plus difficile que de garder le sens du réel, qui devrait pourtant être le propre des défenseurs du vivant — quoi de plus réel que la vie ?

    Le Green Deal tel que l’Union s’y engage soulève quatre questions, chacune d’elle suffisant à ruiner la prétention à l’exemplarité du projet et à condamner sa poursuite.

    La singularité des écosystèmes

    D’abord, la méconnaissance des singularités des écosystèmes qui est la condition de la concentration industrielle et de la globalisation — le rêve du produit unique au prix le plus bas commande l’artificialisation de tous les modes de vie, la négation de la géographie, du relief et du climat, au terme de cette sortie de la nature dont l’air conditionné est le symbole. La réalité du dérèglement climatique, la réalité des agressions chimiques et physiques, la réalité de perte de biodiversité, nulle part n’a des conséquences identiques, nulle part n’a les mêmes enjeux. Il n’y a pas dans le monde deux écosystèmes identiques.

    Ce qui signifie que nulle part, la lutte contre le dérèglement climatique ne peut se dérouler de la même manière — y compris parce que ici ou là, ce dérèglement se traduit par un refroidissement ou par une pluviométrie accrue. Ce qui signifie que les moyens de réduction du CO2 et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère ne sont pas partout identiques, ne serait-ce que parce que les conditions locales de captation-séquestration du carbone ne sont pas les mêmes entre le marais, la mangrove, et la plaine de grandes cultures.

     Dans nombre de pays, la réduction des émissions de CO2 n’a pas de sens, d’abord parce que ces pays sont très peu émetteurs (Afrique ou Amérique latine,), ensuite parce que certains pays nouvellement industrialisés ne sont pas responsables du stock de carbone accumulé par les pays « riches » dans l’atmosphère (la Chine pour sa part se classant désormais dans le camp des accumulateurs étant donné le niveau de ses émissions cumulées). La prétention des COP à répétition à imposer au reste du monde les mesures correctrices des excès des pays accumulateurs est un facteur majeur de la rupture qui se creuse entre « The West » et « The Rest » — et qui interroge le Green Deal sur le plan moral aussi bien que technique.

    Ajoutons que le dérèglement climatique est une preuve majeure des insuffisances du marché, et qu’ajouter un marché du carbone pour y pallier relève de la politique de Gribouille — le marché a des défauts, plus de marché les corrigera… Chacun appréciera la logique !

    Un délire bureaucratique

    Ensuite, le délire bureaucratique qui veut que la norme, la règle et les bureaux doivent tout gérer, tout conduire, tout diriger (1). Le dérèglement climatique tel qu’il est engagé se distingue certes par sa rapidité et son extension. Il met sous tension la capacité d’adaptation des sociétés humaines aux conditions climatiques et géographiques qui sont les leurs. Il ne l’annule pas. Dans l’histoire, ce n’est pas la fragilité des sociétés humaines aux changements du climat et du milieu qui s’impose, c’est au contraire leur capacité spontanée d’adaptation créatrice aux changements de leur milieu. Inutile de citer ces extrêmes que sont les Esquimaux dans leurs igloos et les Touaregs sous la grande tente, les exemples sont tout aussi bien près de nous de la Corse à l’Alsace et de la Bretagne aux Flandres.

    Matériaux locaux, modes de construction traditionnels, recettes locales, habillement et artisanat étaient autant de réponses adaptatives au milieu autorisées par des structures locales décentralisées et soutenues par les préférences collectives légitimées par la relative autonomie des territoires, réponses résilientes tant que le nombre d’habitants et leurs demandes n’excèdent pas la capacité de l’écosystème local à fournir les ressources et absorber les rejets — ce qu’un marché globalisé est incapable de réguler. Utilisant les capacités totalitaires du numérique, fondé sur la croyance infondée que ce qui est bon à Bruxelles est bon pour l’Europe, le Green Deal non seulement ignore l’intelligence adaptative des populations européennes autonomes, comme il ignore la pertinence des solutions traditionnelles d’adaptation au milieu et à ses évolutions, mais il les écrase au nom d’une unification forcée, si bénéfique aux multinationales et à des modèles managériaux et financiers ennemis de toute singularité. Et la fuite en avant dans la privatisation des biens communs et la prise de pouvoir des entreprises privées sur les Nations et les peuples est le contraire de ce que dictent l’expérience, la raison, et l’intelligence, et qui s’appelle localisme.    

    Le royaume des Fondations

    Encore, l’invraisemblable arrogance des solutions proposées, dictées par celles des ONG et des Fondations qui ont acquis le monopole des relations avec la commission européenne. Les évènements qui se succèdent depuis l’invasion russe de l’Ukraine ont totalement modifié la carte des approvisionnements en énergie de l’Europe. Selon sa situation géographique, ses choix énergétiques, les préférences de sa population, chaque pays européen tente d’associer choix de vie de ses citoyens, sécurité d’approvisionnement, et indépendance stratégique. Le pire ennemi de la sécurité et de l’indépendance énergétique européenne est aujourd’hui le choix du tout électrique. La naïveté avec laquelle l’Union endosse une campagne ourdie aux Etats-Unis pour détruire l’industrie automobile européenne est consternante mais révèle la panne stratégique dans laquelle l’Union enfonce l’Europe.

    De même que l’Union détourne le droit pour étouffer la voix des Nations, de même la fausse écologie est l’une des armes de destruction massive choisie par les ennemis de l’Europe ; la complicité permanente des « Verts » avec l’Etat profond américain, les pires errements du « woke » et des néo-cons en est l’expression permanente au Parlement européen. Ce choix place l’Union européenne sous la double dépendance de la Chine pour les matières premières (métaux rares, etc.) notamment dans le solaire et l’éolien, et des Etats-Unis pour le soft, tout véhicule devant devenir un smartphone à roues. Comment l’industrie automobile allemande et française, parmi les deux ou trois premières au monde, a-t-elle pu tomber dans le piège qui lui était tendu par de prétendus lanceurs d’alerte révélant des fraudes aux émissions qui étaient un secret de polichinelle dans l’industrie ?

    Comment l’Union a-t-elle pu entériner ce « sabotage industriel, ce grand saut dans le vide » que déplorait Luc Chatel, Président de la Plateforme automobile, en votant la fin de toute vente de voiture à moteur thermique en 2035 ? Ce choix malthusien a déjà tué la recherche de moteurs à très basses consommation, et condamne l’innovation en ce domaine. Pire encore, il ignore le fait que l’électricité est un vecteur énergétique et non une énergie ; elle procède toujours de sources premières qui vont de l’eau au nucléaire, du gaz au charbon et du solaire à l’éolien ou encore à la biomasse par la méthanisation.

    L’électricité n’a aucune vertu écologique propre, sinon celle de produire de la bonne conscience ; son emploi dissocie le lieu d’émission de CO2 de celui de la production d’énergie source ; au lieu de polluer au long de la route, une voiture électrique pollue quand la centrale à gaz ou charbon produit l’électricité qui charge ses batteries ! La fuite en avant vers le tout électrique traduit la confiance hors de propos dans la continuité d’approvisionnement et la solidité du réseau européen, mais aussi la mentalité des « anywhere » qui entendent ne rien subir des conséquences de leurs modes de vie — pourvu que la centrale soit loin de leur résidence…

    Vers un great Reset ?

    Enfin, le Green Deal est rien moins qu’innocent dans le « Great Reset » qui vide nos campagnes, détruit la vie, étrangle les PME, et livre le monde aux multinationales et aux monopoles numériques. Un « Green Deal » qui ne combat pas le pouvoir exorbitant des géants de l’agrochimie et ne démantèle pas la pieuvre de l’agro-industrie et la fausse science qu’elle diffuse n’a aucune légitimité. Un « Green Deal » qui n’affronte pas l’extension malthusienne des « Intellectual Property Rights » et ne traite pas la destruction des espèces endémiques par les usuriers du vivant et la liberté d’utiliser les semences de ferme hors catalogue fait le jeu des pires ennemis de la vie (que ceux qui veulent en savoir plus voient comment l’industrie américaine a détruit les semences du lupin, une céréale qui pouvait concurrence pour l’alimentation animale le soja, au point que le lupin ne subsiste presque plus qu’en Oural alors qu’il était cultivé partout en Europe !)

    Un Green Deal qui n’aborde pas les conditions de la concurrence, la demande de proximité territoriale et l’exigence de diversité adaptative des modes de production, des systèmes économiques et des régimes alimentaires, n’est que manipulation. L’origine des textes fait peu de doutes ; quelques ONG et Fondations ont écrit les propositions de la Commission européenne, sans transparence et sans contrôle, pour le compte de multinationales et de monopoles qui voient dans la réglementation environnementale orientée selon leurs souhaits un excellent moyen de modifier les conditions de la concurrence, d’imposer leurs intérêts au marché comme au consommateur et d’éliminer des concurrents.

    La taxonomie est le moyen d’imposer des contraintes administratives multipliées à des entreprises qui devront disposer des services spécialisés, coûteuses et hors de portée d’un grand nombre de petites entreprises pour y satisfaire. L’enfer des détails ne sert que la concentration des entreprises, et la mise sous tutelle des Nations et des Etats. Quant à la supercherie de la RSE, des indicateurs de qualité environnementale, il devient de plus en plus évident qu’ils servent non à protéger l’environnement et les citoyens des excès de la technique et des entreprises, mais à protéger les entreprises des dégâts qu’elles provoquent sur l’environnement et la vie des citoyens (une entreprise bien notée ne risque rien !) — et d’abord parce qu’elles ignorent superbement les biens communs, la qualité de la vie et les singularités locales (lire  » The perils and opportunities of ESG investing », Ron Ivey, American Affairs, Spring 2022).

    Le Green Deal est le résultat de l’expulsion des Européens des débats et des décisions de l’Union européenne, mise en place par des organisations complices, comme cette filiale de Bain Company, (cabinet de conseil américain) connue pour avoir sélectionné les « citoyens » consultés pour la Convention sur l’avenir de l’Europe sur la base de leur consentement au fédéralisme… Et comment accepter les prétentions écologiques de Blackrock, choisi pour « conseil » dans le « verdissement » des financements de l’Union, l’un des trois géants mondiaux de la gestion de capitaux, à ce titre coresponsable de la concentration des entreprises, de la constitution de monopoles et de la financiarisation des stratégies d’entreprise ?

    Cette escroquerie démocratique ouvre une voie royale au localisme, foyer de la vraie renaissance européenne, celle des particularités locales, régionales et nationales qui rendra à l’Europe les vrais moyens de son rayonnement ; la diversité de ses peuples, de ses cultures, et des systèmes qu’ils se donnent pour demeurer eux-mêmes, chez eux, dans le foyer que la nature leur offre.

    Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 29 juillet 2022)

     

    Note :

    1 — Les travaux universitaires qui dénoncent l’inconsistance de la « RSE », des indicateurs « ESG » et autres créations de consultants et de financiers en quête de nouveaux territoires se multiplient aux Etats-Unis ; lire : « The perils and Opportunity of ESG investing », Ron Ivey, in American Affairs, Spring 2022.

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  • Instrumentalisation de l’immigration : la capitulation de l’Union européenne...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Paul Tormenen, cueilli sur Polémia et consacré à l'instrumentalisation des flux migratoires contre l'Union européenne.

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    Instrumentalisation de l’immigration : la capitulation de l’Union européenne

    Les flux migratoires ont pris une ampleur considérable en ce début de 21ème siècle. Les pays européens sont particulièrement vulnérables : le manque de contrôles aux frontières et un arsenal juridique favorable permettent en effet à de nombreux migrants clandestins d’entrer en Europe et de s’y maintenir. Les dirigeants de certains pays tiers l’ont bien compris et utilisent l’ouverture intermittente de leurs frontières pour faire pression sur les États européens et sur l’Union européenne.
    Pourtant, en dépit de l’usage répété de ce nouveau moyen de pression, l’Union européenne multiplie les obstacles aux mesures permettant aux pays européens agressés de se défendre. L’évolution possible du contexte politique dans les pays du sud de l’Europe pourrait bientôt changer la donne.

    Les différents aspects de l’instrumentalisation des flux migratoires par des pays tiers à l’U.E. abordés dans le présent article sont les suivants :

    1- L’instrumentalisation des flux migratoires, une nouvelle forme de conflit ;
    2- L’instrumentalisation des migrants, une pratique devenue courante ;
    3- L’instrumentalisation des migrants, une stratégie payante ;
    4- Le droit au service de l’immigration clandestine ;
    5- De nombreux pays européens ont renoncé à faire respecter leurs frontières ;
    6-Les évolutions envisagées dans le cadre du pacte européen sur l’asile et les migrations : un cautère sur une jambe de bois ;
    7- Un motif d’espoir : l’évolution possible du contexte politique dans les pays du sud de l’Europe.

    1- L’instrumentalisation de l’immigration, une nouvelle forme de conflit

    L’instrumentalisation des flux migratoires s’inscrit dans le contexte de l’émergence de nouvelles formes de conflits (cyberattaques, sanctions économiques, etc.), communément désignées sous le terme de « guerre hybride ». Le centre d’excellence pour la lutte contre les menaces hybrides rattaché à l’OTAN décrit une menace hybride comme une action « coordonnée et synchronisée et ciblant délibérément les vulnérabilités des États et des institutions démocratiques. (Les guerres hybrides) sont conduites à l’aide d’un large éventail de moyens et conçues pour rester en deçà du seuil de détection et d’attribution. (…) L’objectif est de saper ou de nuire à une cible en influençant sa prise de décision au niveau local, régional, étatique ou institutionnel » (1).

    Le conseil de l’Union européenne donne la définition suivante de l’instrumentalisation des migrants : « des situations dans lesquelles un pays tiers ou un acteur non étatique a (…) encouragé ou facilité le déplacement irrégulier de ressortissants de pays tiers vers (…) un territoire, afin que ceux-ci se rendent à la frontière extérieure des États membres ». (2)

    Le mode opératoire consiste précisément à provoquer un afflux massif et soudain de migrants clandestins dans un pays donné, dans l’objectif – non revendiqué officiellement – de faire pression sur les autorités de ce pays en désorganisant sa capacité de riposte et en saturant ses capacités d’accueil, afin d’en obtenir un bénéfice.

    2- L’instrumentalisation des migrants, une pratique devenue courante

    La question migratoire est particulièrement sensible en Europe. Depuis le début des années 2010, l’immigration extra-européenne y a pris une ampleur considérable, amenant une partie non négligeable de l’électorat à voter pour des partis politiques prônant un coup de frein à l’immigration tant légale que clandestine (3). Dans ce contexte, l’afflux plus massif et brutal qu’à l’accoutumée de migrants dans l’un des pays de l’Union européenne est surveillé avec attention par nos dirigeants. Certains chefs d’État de pays tiers ont bien compris le bénéfice qu’ils pouvaient en tirer.

    Les tentatives de déstabilisation des États européens par l’ouverture aussi brutale que temporaire des frontières aux migrants ont été nombreuses ces dernières années. On peut même dire qu’elles se multiplient, en dépit d’accords prévoyant un contrôle des départs des clandestins des pays qui utilisent un tel procédé. Nous n’en présenterons que six parmi les plus importantes.

    Le 2 mars 2020, le président de la République turque, R.T. Erdogan, brandissait la menace de l’arrivée de millions de migrants en Europe en ouvrant ses frontières avec la Grèce (4). Quelques jours plus tard, le 7 mars, il mettait sa menace à exécution. Des milliers de clandestins se massaient à la frontière entre la Turquie et la Grèce et pour certains d’entre eux, affrontaient les forces de l’ordre grecques (5). Plusieurs experts en géopolitique s’accordent sur le fait que R.T. Erdogan a amené les migrants à la frontière grecque pour faire pression sur l’Union européenne afin que celle-ci soutienne – ou à tout le moins ne condamne pas – ses opérations militaires menées dans la période en Syrie.

    Le 17 mai 2021, plusieurs milliers de migrants d’origine subsaharienne forçaient la frontière entre le Maroc et l’Espagne afin d’accéder au territoire de Ceuta, parfois en agressant des douaniers espagnols (6). Ces franchissements n’ont très certainement été possibles qu’avec le consentement tacite des autorités marocaines. Bien que non revendiquées officiellement, il s’agissait sans nul doute de représailles du gouvernement marocain, après que le gouvernement espagnol ait autorisé un leader du Front Polisario, militant pour l’autonomie du Sahara occidental, à se faire soigner en Espagne.

    Suite au détournement le 23 mai 2021 par le gouvernement biélorusse d’un avion de la compagnie Ryan Air à Minsk afin d’arrêter un dissident politique, l’Union européenne a durci à partir du mois de juin de cette même année les sanctions à l’encontre de la Biélorussie impactant plusieurs secteurs de son économie.

    La riposte des autorités biélorusses ne s’est pas faite attendre : elles ont rapidement organisé une offensive migratoire contre les pays voisins membres de l’Union européenne, la Lituanie, la Lettonie et la Pologne. Des navettes aériennes ont ainsi acheminé depuis leur pays d’origine ou d’accueil (Turquie, Syrie, Irak, Liban, etc.) des milliers de migrants en Biélorussie, qui ont ensuite été poussés vers la frontière occidentale du pays. La réponse ferme des pays limitrophes et des démarches diplomatiques ont permis en fin d’année de « calmer le jeu » entre les parties concernées.

    En novembre 2021, le gouvernement chypriote constatait une hausse considérable du nombre de migrants arrivant sur l’île par rapport à l’année précédente (+38%) (7). Il accusait la Turquie de vouloir déstabiliser son pays et d’instrumentaliser les migrants en leur permettant de traverser la ligne de démarcation séparant l’ile. Le contentieux sur la reconnaissance de la partie turcophone de l’ile n’est très probablement pas étranger à cet afflux soudain de migrants essentiellement musulmans venant pour beaucoup de Turquie avec un visa étudiant.

    Depuis quelques mois, en dépit de l’accord entre l’Union européenne et la Turquie conclu en 2016, prévoyant notamment un contrôle et une contention des départs des migrants, le rythme des arrivées des clandestins en Grèce venus de Turquie a considérablement augmenté. Selon plusieurs observateurs, cette accélération fait suite aux déclarations du Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, devant le Congrès américain le 17 mai, sur les menaces et les violations de l’espace aérien et maritime grec venant d’un « pays tiers », une façon à peine voilée de pointer la Turquie (8).

    Début juillet 2022, le nombre des arrivées des embarcations clandestines parties d’Algérie sur les côtes espagnoles, à Almeria, a fortement augmenté. Selon le quotidien espagnol El Mundo, les autorités espagnoles s’attendaient à ce que le gouvernement algérien ne reste pas inerte suite à leur revirement sur la question du Sahara occidental, dans un sens favorable au Maroc (9). Un signe ne trompe pas : en juin, les autorités algériennes suspendaient la construction de murs destinés à empêcher les départs clandestins des côtes du pays vers l’Espagne (10).

    3- L’instrumentalisation des migrants, une stratégie payante

    L’instrumentalisation des migrants est très souvent une stratégie payante. Les concessions que doivent faire les États européens et l’Union européenne suite à des offensives migratoires lancées par des États tiers ne font bien évidemment pas l’objet d’une publicité tapageuse. Pour le pays hostile, il s’agit de garder cet atout en main afin de pouvoir le réutiliser. Pour l’État européen et/ou l’Union européenne ayant fait l’objet d’une manœuvre hostile, il s’agit de ne pas perdre la face en montrant sa faiblesse.

    C’est dans la modification aussi discrète que réelle des relations entre États à la suite de ces épisodes d’instrumentalisation de migrants que l’on peut percevoir leur efficacité , comme par exemple l’étrange complaisance de l’U.E. face aux multiples provocations du président turc, R.T. Erdogan, la position des autorités espagnoles soudainement plus favorable au gouvernement marocain au sujet de la question du Sahara occidental, etc.

    Si l’instrumentalisation des migrants a parfois des conséquences dramatiques pour certains d’entre eux, elle permet à d’autres de profiter de l’ouverture temporaire des frontières. Pour ne donner qu’un exemple parmi d’autres, l’offensive migratoire lancée par la Maroc en mai 2021 a permis à de nombreux de migrants d’entrer sur le territoire espagnol de Ceuta, d’y rester ou de gagner le continent européen.

    Outre les manœuvres de pays tiers, les pressions exercées contre des pays membres de l’Union européenne tirent leur efficacité d’un certain nombre de facteurs Parmi ceux-ci, on peut citer l’attractivité sociale et économique des pays européens, un droit excessivement favorable aux clandestins et le renoncement des pays européens à faire respecter leurs frontières.

    4- Le droit au service de l’immigration clandestine

    Les migrants clandestins ne seraient pas aussi déterminés à entrer dans les pays de l’Union européenne s’ils n’avaient pas bon espoir d’y rester. Pour ce faire, nombre d’entre eux font valoir leur droit à la protection au titre de l’asile ou de leur âge. Ils peuvent s’appuyer pour cela tant sur le droit communautaire que sur les conventions internationales (sur l’asile, la protection de l’enfance, etc.) ratifiées par les pays membres de l’Union européenne. La règle du non refoulement est fréquemment invoquée par les défenseurs des migrants clandestins pour qu’ils puissent pénétrer dans les pays de l’Union européenne et faire valoir ces droits. Et quand bien même les migrants sont déboutés de leur demande, la piteuse politique des pays européens de reconduite des clandestins dans leur pays leur assure fréquemment un maintien en Europe sans trop de soucis.

    5- De nombreux pays européens ont renoncé à faire respecter leurs frontières

    Étroitement corsetés par un droit excessivement favorable aux clandestins, incapables tant juridiquement que moralement de défendre l’intégrité de leur territoire, les pays européens et l’Union européenne ont cherché à sous-traiter la protection de leurs frontières. Mais ils ont par cela créé les conditions de leur propre dépendance et de leur asservissement. L’accord le plus connu à ce sujet est celui conclu à grand frais entre la Turquie et l’Union européenne en 2016.

    L’Union européenne a également noué des partenariats avec plusieurs pays africains d’où partent les clandestins (11). Des accords visant à éradiquer les réseaux de trafic de migrants et de traite d’êtres humains ont ainsi été conclus avec la Libye, le Maroc et la Tunisie. Il s’agit aussi plus officieusement d’empêcher les départs de bateaux clandestins des côtes de ces pays vers l’Europe. Ces pays bénéficient à ce titre d’importants subsides de l’Union européenne.

    L’Italie et l’Espagne ont également conclus des accords bilatéraux avec des pays d’Afrique du nord afin d’éviter les départs et d’intercepter les migrants se dirigeant vers leur pays. Cette externalisation du contrôle des frontières de l’Union européenne, qui permet de limiter le nombre des départs d’Afrique, fait l’objet de critiques véhémentes de la part de nombreuses O.N.G. et du lobby immigrationniste (12).

    6- Les évolutions envisagées dans le cadre du pacte européen sur l’asile et les migrations : un cautère sur une jambe de bois

    Compte tenu des compétences partagées avec les États en matière migratoire, l’Union européenne apporte t-elle des solutions aux pays victimes d’offensives migratoires organisées par des pays tiers ?

    L’exemple de l’offensive migratoire menée par la Biélorussie en 2021 est très révélatrice à ce sujet.

    Alors que la Pologne déployait l’armée pour stopper les milliers de migrants poussés par les autorités biélorusses, la Commission européenne proposait le renfort du corps de garde-frontières Frontex. Les autorités polonaises ont purement et simplement décliné cette proposition. La raison ? Elles ne voulaient que des « observateurs des droits fondamentaux » de l’agence européenne vienne accumuler des preuves de la violation du principe de non refoulement. Les efforts de la commissaire européenne aux affaires intérieures, Ylva Johansson, visant à ce que la pratique des douaniers polonais aux frontières soit « conforme avec l’acquis communautaire » ont été vains. « La commissaire Johansson a échoué à convaincre la Pologne sur les refoulements », titrait le site d’information Euractiv le 1er octobre 2021 (13). Il faut pourtant être aveugle pour ne pas voir que l’application de la règle du non refoulement aboutit à céder aux manœuvres des États hostiles.

    Les évolutions envisagées dans le cadre du pacte européen sur l’asile et les migrations donnent-elles des raisons d’espérer ? Les dispositions adoptées lors de la réunion du Conseil de l’Union européenne à Luxembourg le 10 juin 2022 permettent d’en douter (14).

    Dans le nouveau cadre juridique qui doit poursuivre son processus d’adoption, un État peut-il se prévaloir seul d’être victime d’une offensive migratoire pour appliquer des règles plus restrictives d’accès à son territoire ? « l’État membre concerné […] devrait examiner si le Conseil européen a reconnu que l’Union ou l’un ou plusieurs de ses États membres sont confrontés à une situation d’instrumentalisation de migrants ».

    Les frontières du pays agressé pourront-elles être étanches ? «  Les États membres, en particulier dans un cas d’instrumentalisation des migrants, lorsque des ressortissants de pays tiers tentent, en masse, de forcer l’entrée par des moyens violents, peuvent prendre les mesures nécessaires pour préserver la sécurité et l’ordre public. […] Ces limitations et mesures devraient […] être appliquées de manière à garantir le respect des obligations liées à l’accès à la protection internationale, en particulier le principe de non-refoulement ».

    Les demandes d’asile seront-elles suspendues dans un tel contexte ? Aucunement. Leur dépôt pourra se faire à des points d’enregistrement précis situés à proximité de la frontière, notamment à des points de passage frontaliers officiels, et dans des délais plus longs.

    Chacun appréciera le peu de résistance que l’Union européenne permet aux pays européens aux offensives migratoires organisées à leur encontre. On peut à ce sujet parler d’une reddition en pleine campagne, à laquelle le gouvernement polonais a courageusement résisté.

    7- Un motif d’espoir : l’évolution possible du contexte politique dans les pays du sud de l’Europe

    Dans un tel contexte, c’est dans la résistance des pays au dogme immigrationniste que l’on peut trouver des motifs d’espoir. Depuis que le gouvernement conservateur est en place, les autorités grecques pratiquent sans le revendiquer de nombreux refoulements de clandestins se dirigeant vers son territoire par la mer Egée (15). Les changements politiques qui pourraient intervenir prochainement en Espagne et en Italie sont également susceptibles de changer la donne dans ces pays.

    En Espagne, le gouvernement multiplie les mesures favorables aux clandestins (régularisations, etc.) Mais, à un an et demi des élections législatives, les socialistes au pouvoir ont connu en juin de cette année une sévère défaite lors de l’élection au parlement andalou. Cela laisse augurer une alternance politique dans le pays moins favorable à l’immigration clandestine, fin 2023.

    Les perspectives d’un changement politique majeur sont plus proches en Italie. Suite à la démission de Mario Draghi du poste de premier ministre, des élections vont être organisées à l’automne et des partis farouchement opposés à l’immigration clandestine, La Lega et surtout Fratelli d’Italia, pourraient bien les remporter.

    L’accession au pouvoir de partis politiques résolument opposés à l’immigration clandestine serait une très mauvaise nouvelle pour les gouvernements des pays qui souhaitent lancer de nouvelles offensives migratoires en Europe. Plus que jamais, la situation politique dans ces pays en première ligne conditionnera la résistance à ces guerres qui ne disent pas leur nom. Mais au-delà de ces perspectives, les dirigeants des pays européens ne pourront pas faire l’économie d’une profonde refonte de tout l’arsenal juridique qui permet à l’immigration clandestine d’atteindre l’ampleur insensée qu’elle a actuellement.

    Paul Tormenen (Polémia, 27 juillet 2022)

     

    (1) « Le concept de guerre hybride : origines, application, contre-action ». Geoplitika.ru. 21 novembre 2021
    (2) « Code frontières Schengen: le Conseil adopte son orientation générale ». Communiqué de presse du Conseil de l’U.E. 10 juin 2022
    (3) « L’Invasion de l’Europe – Les chiffres du Grand Remplacement » : la preuve par les faits ». Polémia. 4 décembre 2020
    (4) « Erdogan menace l’Europe de « millions » de migrants ». Le Point. 2 mars 2020
    (5) « Turquie : des milliers de migrants se massent à la frontière avec la Grèce ». Le Parisien. 1er mars 2020
    (6) « Espagne. Près de 6 000 migrants arrivés en moins de 24 heures à Ceuta depuis le Maroc ». Breizh Info. 18 mars 2021
    (7) « Chypre veut suspendre les demandes d’asile ». Infomigrants. 12 novembre 2021
    (8) « Les tensions entre la Turquie et la Grèce aboutissent à une rupture du dialogue ». Econostrum. 24 mai 2022
    (9) « Argelia cumple su amenaza y empieza a inundar de pateras las costas españolas ». El Mundo. 1er juillet 2022
    (10) « Argelia paraliza la construcción de los muros de contención de salida de ilegales a España ». La Gaceta de la Iberosfera. 15 juin 2022
    (11) « Joint communication to the European Parliament, the European Council and the council. Migration on the Central Mediterranean route Managing flows, saving lives ». Commission européenne. 25 juillet 2017
    (12) « Externalisation des frontières de l’Union européenne ». Pour la solidarité. Juillet 2020
    (13) « Commissioner Johansson failed to convince Poland on pushbacks ». Euractiv. 1er juillet 2021
    (14) « Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2016/399 concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes ». Conseil de l’Union européenne. 9 juin 2022
    (15) « En 2021, une ONG comptabilise 629 cas de refoulements illégaux dans les îles grecques ». Infomigrants. 7 janvier 2022

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  • Immigration : le directeur de Frontex jette l’éponge, les No Border jubilent...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de Paul Tormenen, cueilli sur Polémia et consacré à l'affaire Frontex. Edifiant...

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    Immigration. Le directeur de Frontex jette l’éponge, les No Border jubilent

    Le 28 avril, le directeur exécutif de l’agence européenne de garde-côtes et garde-frontières Frontex, Fabrice Leggeri, a présenté sa démission à son conseil d’administration. Cette décision, lourde de conséquences, intervient après une longue campagne de dénigrement de l’activité de Frontex. Au-delà du cas individuel de F. Leggeri, sa démission illustre le rapport de force au sein des institutions européennes, qui a clairement penché en faveur des partisans de l’ouverture inconditionnelle des frontières aux extra-Européens. Le changement attendu des modalités d’intervention de Frontex va sans aucun doute entraîner une accélération des flux d’immigration clandestine à destination de l’Europe. La jubilation des militants sans frontières à la suite de cette annonce n’a d’égal que l’aveuglement d’Emmanuel Macron qui évoquait dans son programme en vue de la récente élection présidentielle « l’Europe des frontières qui lutte contre l’immigration clandestine ».

    Des campagnes d’opinion à répétition contre Frontex

    Les critiques les plus virulentes contre le rôle et l’action de Frontex ont commencé en 2012. Il s’agissait – déjà – de dénoncer le fait que la politique migratoire européenne faisait supposément prévaloir la sécurité des frontières sur la protection des personnes. Le réseau Migreurop organisait alors une campagne auprès de l’opinion publique visant rien de moins que la suppression de Frontex (1).

    Peu après, une campagne appelée « Frontexit » était lancée à partir de mars 2013 pour recenser les « violations des droits humains » par certains des agents du corps de garde-côtes et garde-frontières (2).

    Durant les dernières années, de nombreux médias et des politiciens ont également mené un véritable travail de sape contre les actions de Frontex visant à endiguer l’immigration clandestine à destination de l’espace Schengen. Il est dans le contexte actuel utile d’en rappeler quelques faits marquants.

    On ne compte plus les articles dans les médias de grand chemin accusant Frontex de pratiquer une chasse aux migrants, d’être une « armée d’occupation » (!), d’avoir un « océan d’impunité », d’exercer son action en toute opacité, etc. (3). Au-delà des accusations « morales », des journalistes d’investigation ont cherché à argumenter leurs griefs à l’encontre de Frontex. Ils ont pour cela bénéficié d’importants moyens financiers.

    En octobre 2020, l’hebdomadaire allemand Der Spiegel et le site d’investigation Bellingcat rendaient public une enquête à charge contre Frontex. Se basant sur l’exploitation d’informations en accès libre et sur des témoignages d’ONG, Bellingcat accusait l’agence Frontex d’avoir pratiqué plusieurs refoulements de clandestins en mer Égée, entre la Turquie et la Grèce, entre les mois d’avril et d’août 2020 (4). Ces accusations ont été reprises par l’hebdomadaire allemand Der Spiegel dans un article du 22 octobre 2020 et ont ensuite été très largement médiatisées, souvent sans aucun recul critique (5).

    Les journalistes du Spiegel précisent à la fin de l’article consacré à l’enquête que celle-ci a été financée par l’Investigative Journalism for Europe (IJFO), une fondation qui soutient le journalisme d’investigation dans l’Union européenne. L’IJFO ne cache pas, sur son site, avoir comme cofinanceur l’Open Society Foundations et… la Commission européenne (6).

    Le site d’investigation Bellingcat a, quant à lui, reçu entre 2016 et 2018 383 000 dollars de l’Open Society Foundations. Il fait partie du Global Investigative Journalism Network, dont la vocation est la formation et l’échange d’informations entre journalistes d’investigation. Cette association a reçu entre 2017 et 2019 1,1 million de dollars de l’Open Society Foundations (7). Le créateur de l’Open Society Foundations n’est autre que le milliardaire américain George Soros, qui a abondé sa trésorerie de la modique somme de 18 milliards de dollars en 2017 (8).

    Mais, en dépit de son retentissement, cette première charge ne devait pas être suffisante. Le 27 avril 2022, plusieurs médias dont Le Monde, Der Spiegel et Lighthouse Reports renouvelaient leurs critiques contre la direction de Frontex. Les conclusions de leur nouvelle enquête publiée notamment dans le journal Le Monde mettent une nouvelle fois en exergue la pratique de refoulements en mer Égée, qui seraient connus mais tolérés ainsi que le fait que Frontex aurait « maquillé des renvois illégaux de migrants » (9). Une nouvelle fois, l’ombre de George Soros n’est jamais loin. L’Observatoire du journalisme a, en effet, dans un article récent, mis en lumière les liens, à tout le moins financiers, entre Lighthouse Reports et l’Open Society Foundations et l’Open Society European Policy Institute (10).

    Pourquoi mentionner le financement – direct ou indirect – de ces enquêtes ? Parce que George Soros œuvre depuis de nombreuses années pour l’accueil le plus large de migrants en Europe. Il a même été qualifié par le journal Valeurs actuelles de « militant de la submersion migratoire » (11). Et c’est bien sous le prisme unique du droit inconditionnel des migrants à s’installer en Europe que ces enquêtes ont été réalisées, indépendamment de toute considération pour les populations autochtones, notamment leur droit à la continuité historique

    La guérilla contre Frontex au sein de l’UE

    Les accusations contre Frontex ont également été portées dans et parfois par les institutions européennes.

    En décembre 2020, des parlementaires européens d’extrême gauche et écologistes demandaient à la suite de la parution du reportage du Spiegel et de Bellingcat une enquête sur le fonctionnement de Frontex. Certains d’entre eux exprimaient – déjà – sans équivoque le souhait que Fabrice Leggeri démissionne (12).

    En janvier 2021, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) annonçait de façon laconique engager une enquête sur Frontex, sans toutefois dévoiler le périmètre de sa mission (13).

    En avril 2021, une majorité de parlementaires européens refusaient d’approuver le budget de Frontex de l’année 2019. Outre des considérations d’ordre financier, la pratique des refoulements par des agents de Frontex était mise en accusation (14).

    Si ce budget a été finalement approuvé, une majorité de parlementaires demandaient en octobre 2021 à la Commission européenne de geler une partie de celui de l’année 2022. Les conditions posées au déblocage des fonds étaient les suivantes :

    • le recrutement de vingt officiers aux droits fondamentaux et de trois directeurs exécutifs dotés de qualifications suffisantes ;

    • la mise en place d’un mécanisme de signalement des incidents graves aux frontières extérieures de l’UE et la création d’un système opérationnel de surveillance des droits fondamentaux (15).

    Le 24 mars 2022, l’ONG. no border Front-LEX adressait une mise en demeure de treize pages à la commissaire européenne aux affaires intérieures, Ylva Johansson. Dans ce document, Front-LEX enjoignait la Commission européenne d’engager une procédure visant à la démission de Fabrice Leggeri (16). L’ONG. menaçait par ailleurs d’engager des poursuites devant la Cour de justice de l’Union européenne en cas d’inaction de la part de la Commissaire européenne.

    Le 31 mars, une majorité des membres de la commission de contrôle des comptes de l’UE refusait de valider les comptes de Frontex, principalement pour le motif de pratiques de refoulement de migrants et de demandes d’asile refusées en Hongrie (17).

    Leggeri « lâché » par la France ?

    C’est dans ce contexte d’accusations incessantes que s’est tenu le conseil d’administration de Frontex le 28 avril. Avant même la publication du rapport de l’OLAF sur la gestion de l’agence, avant même que l’association Front-LEX ne poursuive la commissaire européenne aux affaires intérieures devant la CJUE. et que celle-ci statue sur ses griefs, le conseil d’administration de Frontex a donc décidé d’accepter la démission de Fabrice Leggeri. Le soutien au directeur exécutif de Frontex des représentants de certains pays, la Grèce, la Hongrie et la Pologne, n’aura donc pas été suffisant (18).

    On peut se demander si l’élément déclencheur déterminant de la démission de Fabrice Leggeri n’est pas la fin du soutien que lui apportaient le gouvernement français et le président de la République, Emmanuel Macron…

    Amer, l’ancien directeur de Frontex a envoyé un dernier courriel au personnel de l’agence, qui résume les principaux enjeux liés à sa décision de démissionner :

    « Tout au long des deux dernières années, j’ai pu voir un narratif discret mais efficace envahir notre environnement. Selon ce narratif, l’activité centrale de Frontex devrait être transformée en celle d’une espèce d’agence des droits fondamentaux encadrant ce que font les États membres à leurs frontières extérieures. Mais le mandat qu’a eu Frontex en 2016 et encore plus en 2019, est d’être l’agence européenne de garde-côte et garde-frontière. […] Ma vision était et est encore que Frontex est, avec son rôle opérationnel, une agence agissant pour faire respecter la loi en soutien des États membres et qui contribue au bon fonctionnement de l’espace commun européen de sécurité, de liberté et de justice. J’avais cru comprendre que c’était ce qu’attendent les États membres et les citoyens européens de nous. Je constate que cette vision des choses n’est plus partagée au niveau politique. C’est la raison pour laquelle j’ai pris la décision de démissionner, ne pouvant rester pour mettre en œuvre ce qui n’est pas le mandat de l’agence. J’espère que cette démission va favoriser un débat politique au niveau européen afin de clarifier la mission que l’on attend de Frontex, en espérant que la vision du législateur qui prévalait en 2019 continue à prévaloir dans le futur… » (19). 

    « L’Europe des frontières », pierre angulaire du programme de Macron

    La démission de Fabrice Leggeri met en lumière l’impérieuse nécessité de faire évoluer le principe jusqu’ici intangible du non-refoulement. Il devient en effet de plus en plus manifeste que priver les agents de Frontex et ceux des États européens du pouvoir de décider qui entre sur leur territoire et qui n’y entre pas revient à remettre en cause le principe de régularité du séjour, et, in fine, à abolir les frontières. Cela est d’autant plus vrai que les migrants franchissent la frontière vers l’Europe à partir de pays limitrophes qui leur offrent la possibilité d’exercer leurs droits et où ils n’y sont pas persécutés. On ne peut également pas passer sous silence la motivation économique de ces migrants qui font des milliers de kilomètres pour s’installer en Europe. Il s’agit beaucoup trop souvent de mettre un pied dans la porte d’un pays européen en utilisant un droit individuel, pour n’en plus repartir.

    Lors de la campagne électorale en vue de sa réélection, Emmanuel Macron a fait de « l’Europe des frontières qui lutte contre l’immigration clandestine » l’une des pierres angulaires de son programme en matière migratoire. Quatre jours après son élection, le directeur exécutif de Frontex était débarqué en raison de l’activité de certains de ses agents pourtant conforme à la mission première de l’agence : lutter contre l’immigration clandestine.

    Pire, cette démission, qui devrait se traduire par plus de laxisme et moins de refoulements, intervient dans un contexte d’accélération des flux migratoires. Le nombre de franchissements illégaux détectés des frontières extérieures de l’Union européenne a en effet retrouvé le niveau de 2016, pour atteindre 40 300 entre janvier et mars 2022, soit 57 % de plus qu’en 2021 (20). Et le retour de l’été ne fera, comme les années précédentes, que renforcer cette tendance. Les chiffres sont encore plus inquiétants sur une période longue : durant les sept dernières années, près de trois millions de franchissements illégaux ont été détectés aux frontières extérieures de l’Union européenne. En France, ces flux viennent inéluctablement grossir le nombre de demandeurs d’asile et celui des clandestins qui se maintiennent illégalement sur le territoire.

    Mais l’affaire ne s’arrête pas. L’ONG Front-LEX veut visiblement que d’autres têtes tombent au sein de Frontex. Il est vrai que, une fois l’ancienne équipe de direction de l’agence décimée, il devrait être plus facile de remplacer sa vocation de garde-côtes et garde-frontières par celle d’accueil et d’orientation des migrants clandestins. Front-LEX vient à ce sujet de soumettre une requête auprès de l’OLAF afin d’avoir communication des noms des autres cadres de Frontex « impliqués dans les refoulements systématiques » (21).

    Il ressort de cette affaire qu’un vent mauvais souffle sur les pays membres de l’espace Schengen. Nos dirigeants se privent consciencieusement de tous les outils nécessaires à la maîtrise des flux migratoires. La démission de Fabrice Leggeri doit dans ce cadre être interprétée comme un nouvel aveu d’échec dans une véritable protection des frontières extérieures de l’UE.

    Paul Tormenen (Polémia, 03 mai 2022)

    Sources :

    (1) « Faire sombrer Frontex ». Plein droit. 2014.
    (2) « Frontex : un océan d’impunité ». Politis. 13 mars 2019.
    (3) Requête Frontexit. 29 janvier 2021.
    (4) « Frontex at Fault: European Border Force Complicit in ‘Illegal’ Pushbacks ». Bellingcat. 23 octobre 2020.
    (5) « EU Border Agency Frontex Complicit in Greek Refugee Pushback Campaign ». Spiegel International. 23 octobre 2020.
    (6) Site du Investigative journalism for Europe. « about ». Consultation le 29 janvier 2021.
    (7) Open Society Foundations. Grants. Requête « Global Investigative Journalism Network ». Consultation le 29 janvier 2021.
    (8) « George Soros Transfers Billions to Open Society Foundations ». The New York Times. 17 octobre 2017.
    (9) « Frontex, l’agence européenne de gardes-frontières, a maquillé des renvois illégaux de migrants en mer Égée ». Le Monde. 27 avril 2022.
    (10) « L’offensive médiatique contre la défense des frontières européennes s’intensifie. Seconde partie ». OJIM. 25 décembre 2021.
    (11) « Soros, le militant de la submersion migratoire et de l’islamisme ». Valeurs actuelles. 11 mai 2018.
    (12) « EU Parliament pressing for inquiry into Frontex ». EUobserver. 20 janvier 2021.
    (13) « EU anti-fraud office launches probe into Frontex ». EUobserver. 11 janvier 2021.
    (14) « Immigration : l’agence Frontex sanctionnée par le Parlement européen ». Le Monde. 30 avril 2021.
    (15) « Le Parlement demande le gel d’une partie du budget de Frontex jusqu’à ce que des améliorations clés soient apportées ». Communiqué de presse du Parlement européen. 21 octobre 2021.
    (16) Courrier du 24 mars 2021 de Front-LEX à Ylva Johansson.
    (17) « EU lawmakers refuse to sign off Frontex budget ». EUobserver. 1er avril 2021.
    (18) « EU border agency chief resigns after critical watchdog probe ». Politico. 29 avril 2022.
    (19) Tweet de Steffen Lüdke, 29 avril 2022.
    (20) Bulletin de situation. Frontex. 14 avril 2022.
    (21) Tweet de Front-LEX. 29 avril 2022.

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  • Voyage au Wokistan : l’anti-Europe se dessine à Bruxelles...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Guillaume Durocher cueilli sur le site de l'Institut Iliade et consacré à l'officialisation progressive de l'idéologie "woke" grâce à l'action des institutions de l'Union européenne.

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    Une affiche de campagne de communication pro-islamique du Conseil de l’Europe.

     

    Voyage au Wokistan : l’anti-Europe se dessine à Bruxelles

    Le Parlement européen a adopté récemment une résolution établissant sa position concernant la lutte contre le « racisme » dans la culture, l’éducation, les médias et les sports. Ce texte indigeste constitue un véritable florilège d’exigences ethniques et de novlangue progressiste. Les eurodéputés souhaiteraient lutter contre le « racisme structurel » et imposer « une approche intersectionnelle de l’élaboration des politiques ». Autant dire que Bruxelles a acté sa conversion au wokisme !

    Au-delà de ce vulgaire charabia, la clause la plus choquante est sans doute la suivante : le Parlement exige la censure de médias publiant des informations « stigmatisantes », définies comme celles « ciblant les migrants comme étant la source de divers problèmes socio-économiques et en accordant une couverture disproportionnée aux infractions commises par des migrants ». De fait, les eurodéputés exigent la censure d’informations exactes dans la mesure qu’elles nuisent à l’idéologie dominante. Le fait est que les populations africaines et musulmanes en Europe occidentale sont très souvent disproportionnellement concernées par l’insécurité, l’assistanat et la sous-performance scolaire et économique.

    Immigration, insécurité et « problèmes socio-économiques » : florilège de statistiques

    Les statistiques aussi bien que le vécu quotidien des Européens dans les zones nouvellement « diversifiées » l’attestent. Par exemple, la police de Londres indique qu’en 2019 des Noirs étaient impliqués dans 51 % des attaques au couteau, alors qu’ils ne représentent que 13 % de la population londonienne. Ces chiffres sont stables depuis 10 ans et tout à fait comparable à la criminalité afro-américaine aux États-Unis d’Amérique.En France, une étude de l’INSEE de 2012 avait constaté que les immigrés et les descendants d’immigrés d’origine maghrébine, africaine et turque étaient largement plus concernés par l’échec scolaire, le chômage et l’accès aux HLM que ne l’étaient les indigènes ou les immigrés d’origine européenne ou asiatique.En Allemagne, la décision unilatérale de la chancelière Angela Merkel d’accueillir plus d’un million de prétendus « réfugiés » en 2015 a coïncidé avec une augmentation importante de l’insécurité. Trois années plus tard, les statistiques officielles démontrèrent que 92 % de cette augmentation avait pour cause de jeunes migrants de sexe masculin. Le point culminant de cette vague de violence fut les agressions – dont 500 à caractère sexuel – subites par 1 200 femmes lors de la nuit de la Saint-Sylvestre à Cologne, à Hambourg et dans d’autres villes allemandes. Pendant ce temps-là, le ministère de l’Intérieur allemand tenta d’étouffer l’affaire en supprimant toute mention de « viol » du rapport policier et la Commission européenne affirma qu’il n’y avait aucun lien avec les migrants et qu’il fallait contrer toute réaction « xénophobe ».À Rotherham et dans d’autres villes anglaises, des gangs essentiellement d’origine pakistanaise ont perpétré plus de 2 400 viols sur mineur. Les élus locaux refusèrent pendant des années de s’opposer à ces crimes monstrueux car ils ne voulaient pas « donner de l’oxygène aux opinions racistes ». La devise officielle du conseil municipal de Rotherham ? « Où tout le monde compte. »L’hebdomadaire britannique The Economist a révélé que les migrants originaires du Moyen-Orient et du Maghreb ont un impact fiscal uniformément négatif au Danemark tout au long de la vie, consommant plus en matière d’assistanat et de services publics qu’ils ne contribuent en impôts. Leur situation contraste fortement avec la situation des indigènes danois et des immigrés d’origine occidentale. Le magazine illustra ces chiffres avec un graphique au titre « C’est compliqué », alors que la situation est tout à fait limpide.On peut multiplier ces chiffres pour à peu près tous les pays occidentaux dès lors que les statistiques concernées sont collectées et publiées. Or, toute cette criminalité « disproportionnelle » et tous ces « problèmes socio-économiques » (un bel euphémisme) ont une cause première et fondamentale : l’immigration en Europe des populations concernées. Mais les eurodéputés souhaitent tout simplement interdire aux médias de soulever ces faits qui pourrissent la vie des Européens.

    Imposer la censure dans les médias audiovisuels et les réseaux sociaux

    Le Parlement européen ne fait pas que demander la censure de faits embarrassants. Il exige que les autorités de réglementation audiovisuelle (CSA et autres) aient plus de compétences pour censurer des émissions ayant « des contenus discriminatoires ou racistes » et qu’on élimine les financements publics aux médias promouvant des « discours haineux et xénophobes ». Au contraire, les médias devraient « éviter les pratiques qui entretiennent ou renforcent les stéréotypes négatifs concernant des minorités ethniques ou raciales » et « montrer des membres de ces communautés dans des rôles positifs ».Les eurodéputés ont également appelé à « accroître la responsabilisation des plateformes numériques et des réseaux sociaux afin de lutter contre la diffusion de l’incitation à la haine raciale à l’égard des migrants et des minorités », exigeant de fait plus de censure sur les réseaux sociaux.Le rapporteur du texte est Salima Yenbou, une eurodéputée française d’origine algérienne, née en Seine-Saint-Denis. Cette élue, issue du groupe des Verts mais ayant depuis rallié le camp macroniste, défendit son texte en déclarant :« Nous devons lutter activement contre le racisme, afin que nos filles et nos fils n’aient plus à se demander s’ils ont leur place dans notre société. Afin de construire un avenir meilleur, nous devons connaître et comprendre notre histoire. C’est pourquoi il est important que les étudiants en apprennent davantage sur le colonialisme, l’esclavage, le génocide et tous les phénomènes liés. »Elle ajouta qu’il fallait « mettre fin aux médias qui diffusent des propos racistes sur les migrants et les réfugiés, ainsi qu’aux contenus qui sont racistes, qu’ils soient intentionnels ou non. » La mission d’éliminer des contenus dits « racistes non intentionnels » donnerait à l’État de vastes compétences dans le domaine de la censure.

    Déseuropéaniser la culture et l’instruction

    Le texte complet exige de nombreuses autres mesures aboutissant à une sorte de racialisation radicale des politiques publiques. En effet, les eurodéputé exige que le « le coordinateur ‘antiracisme’ [de la Commission européenne] dispose de ressources adéquates et à ce que toutes les [Directions générales] contribuent à la prise en compte de l’égalité raciale dans l’ensemble des politiques de l’Union ».Les politiques éducatives et culturelles seraient particulièrement concernées. Les manuels scolaires doivent être réécrit afin de mentionner « des auteurs, des historiens, des scientifiques, des artistes et d’autres personnalités de races et d’origines ethniques variées ».Les programmes d’Hisoitre seraient modifiés par « une approche ciblée du passé des communautés raciales et ethniques vivant en Europe », mettant l’accent « sur les contributions des communautés racialisées au développement et à la construction de l’Europe d’aujourd’hui ».En outre, les eurodéputés exigent l’éradiation du « harcèlement à caractère raciste » dans les écoles. Mais on se demande bien qui en est la source !La racialisation éducative ne s’arrêterait pas au niveau scolaire. En effet, les États devraient mettre en place « des programmes pour l’apprentissage tout au long de la vie à destination des fonctionnaires, et notamment des forces de l’ordre, afin d’éliminer les comportements racistes et xénophobes ».Côté culture, le Parlement préconise le lancement d’initiatives « telles que des systèmes de bons ou des projets similaires, encourageant les personnes de différentes communautés raciales et ethniques à participer à des manifestations culturelles ». En bref des « chèques culture » visant les non blancs !En outre, on doit favoriser « la diversité au sein des institutions culturelles, tant au niveau des employés que de la direction, en fixant des critères permettant de recevoir des fonds publics et des conditions d’attribution de ces derniers ». Traduit en bon français : conditionner l’obtention de fonds publics sur la « discrimination positive » en faveur des non-blancs.Les acteurs culturels européens doivent se réorienter en faveur des allogènes et ainsi promouvoir « les langues, les cultures et l’histoire des minorités dans les programmes scolaires, les musées et les autres formes d’expression culturelle et historique » et soutenir « l’art et la culture des groupes racialisés et ethniques ». En bref, il s’agit déseuropéaniser l’enseignement de l’Histoire et la culture dans notre continent en faveur des traditions allogènes, essentiellement africaines et islamiques.

    Les Européens, boucs émissaires des échecs du multiculturalisme

    Le texte du Parlement contient également de nombreuses affirmations tendant à blâmer les Européens pour les échecs du multiculturalisme et les difficultés auxquelles font face les populations allogènes. En effet, on affirme que « le racisme existe dans tous les domaines de notre vie quotidienne » et que ce racisme « est profondément ancré dans la société et étroitement lié à ses racines culturelles, à son héritage et à ses normes sociales ».Le passé européen serait à l’origine des maux contemporains. Les eurodéputés affirment que « certains aspects de l’histoire européenne, notamment la colonisation, l’esclavage et les génocides, en particulier l’Holocauste, ainsi que d’autres manifestations de racisme, continuent d’avoir une incidence durable sur la société contemporaine ». Ces sujets doivent être « contextualisés [… ] en vue d’une meilleure compréhension des liens entre passé et présent ».
    Le législateur européen ne manque pas d’ailleurs d’une certaine schizophrénie concernant la diversité ethnique et ses problèmes connexes. Par exemple, il affirme que « les sociétés européennes accueillent une diversité culturelle de plus en plus importante et que les personnes nées à l’étranger et leurs descendants forment une part croissante de la population », ce qui revient à reconnaître l’existence du Grand Remplacement.En outre, le Parlement affirme que « la collecte de données de bonne qualité est l’un des moyens les plus efficaces d’analyser les problèmes sociaux, de manière quantitative comme qualitative, et qu’elle est essentielle pour concevoir, adapter, suivre et consolider des politiques publiques fondées sur des données probantes en réponse à ces problèmes ». On ne saurait être en désaccord, mais aura-t-on des données sur la criminalité, le recours à l’assistanat et les contributions fiscales ?Les données donnent tort aux chantres du vivre-ensemble et de la créolisation de l’Europe. En effet, les eurodéputés eux-mêmes reconnaissent que l’intelligence artificielle (IA) tend à être « discriminatoire ». Mais est-ce que cela serait dû aux préjugés des codeurs à la Silicon Valley – d’origine asiatique aussi souvent qu’européenne – ou simplement des données objectives qu’analyse l’IA ?Les analyses du Parlement européen sont autant de perles qui convergent vers un objectif clair : la démoralisation des Européens par la délégitimation de leur identité, le dénigrement de leurs réalisations historiques et l’attribution des échecs contemporains du multiculturalisme au passé honteux des Européens.​

    Hypocrisie et autoritarisme des mondialistes

    On ne soulignera jamais assez le caractère hypocrite des institutions mondialistes, se pavant du caractère « libéral » et « ouvert » de leur pouvoir, tout en étant profondément autoritaire.Le texte du Parlement en donne un exemple parfait. Il affirme que « la désinformation cible souvent des minorités et contribue à l’agitation sociale » et que « des médias indépendants et pluralistes qui promeuvent des récits équilibrés œuvrent en faveur de sociétés inclusives ». En outre, on doit instruire les jeunes afin qu’ils prennent « conscience des conséquences négatives de l’intolérance et […] développer leur esprit critique ».On veut imposer aux Européens la censure et un lavage de cerveau afin qu’ils ne puissent reconnaître les désavantages patents de l’immigration africaine et islamique – que ce soit en matière de criminalité, de recours à l’assistanat ou d’identité – et le régime se permet de chanter les louanges de « l’esprit critique » et des « médias pluralistes » !C’est que le régime ne tolère « l’esprit critique » et le « pluralisme » qu’à condition qu’un point de vue unique soit imposé : l’idéologie multiculturaliste, égalitariste et mondialiste. Cette hypocrisie au cœur du progressisme est révoltante.Le Parlement condamne les nationalistes qui chercheraient à « diviser nos sociétés ». Mais c’est chose faite : nos sociétés sont en effet profondément divisées du fait qu’elles ont perdu leur homogénéité ethnoculturelle et ne bénéficient plus d’une identité partagée.Aujourd’hui déjà, à peine la moitié des enfants nés en Belgique le sont de parents belgo-belges. Vraisemblablement un tiers, comme en France, sont d’origine africaine ou musulmane. Les tendances démographiques sont similaires dans toute l’Europe occidentale. Il faut remonter aux invasions barbares qui accompagnèrent la chute de l’Empire romain, voire aux conquêtes indo-européennes, pour constater un tel remplacement des populations indigènes du continent.En démocratie, les citoyens doivent pouvoir connaître les faits concernant les transformations de leur société. Plus encore, nos peuples doivent pouvoir décider du caractère démographique de leur société dans 10, 20 ou 100 ans. Le Parlement dit « européen » ne souhaite pas que les Européens puissent avoir connaissance des changements que subissent leurs nations, encore moins les dénoncer.Et on ne peut que regretter que l’adoption de ce texte par le Parlement ait été massive. Malgré ses clauses liberticides et son langage ahurissant, 495 eurodéputés ont voté en faveur de la résolution, 109 contre et 92 se sont abstenus. Ne possédant pas la liste des votes, on peut se demander si des eurodéputés prétendument conservateurs ont voté pour ce texte.Ce document établissant la position officielle du Parlement européen est un indicateur important de la wokisation des esprits au sein des institutions. Jusqu’à récemment, l’Union européenne s’était largement abstenue de militer sur les questions raciales. Le recrutement au sein de la fonction publique européenne se fait encore par le biais de tests de raisonnement, de fait des tests de quotient intellectuel (QI). Il est vrai que les gérants de ressources humaines ont commencé à s’offusquer de l’absence d’« individus racialisés » parmi les fonctionnaires.Ce n’est pas la première fois que les institutions effectuent de tels dérapages. Le Conseil de l’Europe a dû retirer une campagne qui affirmait, je traduis de l’affreux globish : « La beauté est dans la diversité comme la liberté est dans le hijab. »De même, la Commission européenne s’est vue contrainte de retirer ses « lignes directrices sur le langage inclusif », qui recommandaient de ne pas utiliser les expressions de « période de Noël » et « du fait de l’homme ». Les fonctionnaires européens avisèrent également de ne pas utiliser des prénoms comme « Marie et Jean » en tant qu’exemple, préférant « Malika et Julio ».Si la position du Parlement n’est pas contraignante, elle suggère la direction future des institutions européennes sur ces questions. La Commission européenne a récemment décidé d’enclencher le processus pour priver le gouvernement hongrois de fonds européens, malgré le fait que Viktor Orbán ait été fraîchement réélu avec 54 % des voix. Il ne fait pas de doute qu’il s’agit aussi d’une punition du gouvernement hongrois pour son orientation illibérale et patriote.L’UE a également décidé récemment d’interdire les médias russes dans le cadre de la guerre russo-ukrainienne. Le journaliste de Libération Jean Quatremer ne put cacher son émoi, déclarant : « La censure de RT et de Sputnik crée un dangereux précédent. » Il est probable que le tournant autoritaire et woke des institutions européennes entraînera des répercussions pour les nationalistes français et européens. Agissons en conséquence !
     
    Guillaume Durocher (Institut Iliade, 20 avril 2022)
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  • Les retombées géopolitiques de la guerre en Ukraine...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Patricia Lalonde, cueilli sur le site de Geopragma et consacré aux conséquences de la guerre russo-ukrainienne sur le paysage géopolitique mondial. Chercheuse à l’IPSE (Institut de Prospective et de Sécurité́ en Europe), Patricia Lalonde a succédé à Caroline Galactéros à la tête de Geopragma.

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    Les retombées géopolitiques de la guerre en Ukraine

    Les conséquences de la guerre des Russes en Ukraine sont innombrables : si les pays européens ont unanimement condamné l’intervention russe en Ukraine, il n’en est pas de même pour la plupart des pays du Moyen-Orient et de la sphère eurasiatique. 

    Après le refus de la Chine et de l’Inde de condamner l’opération militaire russe en Ukraine, il semblerait que les pays du Moyen-Orient tentent, eux aussi, d’éviter une brouille avec la Russie.

    Israël, soucieuse de ne pas froisser un pays avec lequel elle entretient de bonnes relations – grâce à l’importante communauté juive sur son sol – s’est dans un premier temps abstenu de condamner la Russie lors du vote aux Nations Unies, même si elle finira sous la forte pression américaine, par voter pour son retrait de la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies. Son Premier ministre Naftali Bennett proposera son aide pour une médiation entre la Russie et l’Ukraine, ce qui ne sera pas bien vu des côtés européen et américain. Néanmoins, malgré les remous politiques que la crise ukrainienne provoque dans le pays, les dirigeants israéliens savent qu’un accord avec le voisinage reste primordial pour la sécurité d’Israël.

    L’Invitation de Bachar el Assad par Mohamed Ben Zayed aux Emirats Arabes Unis reste sans doute l’acte le plus significatif d’une possible recomposition au Moyen-Orient.

    MBZ, qui a signé les accords d’Abraham à l’initiative de Donald Trump, pourrait chercher à devenir un facilitateur dans une prochaine réintégration de la Syrie dans le Conseil de Coopération du Golfe, espérant ainsi ouvrir la voie à un possible futur nouveau Levant.

    La visite du ministre des Affaires étrangères du Barheïn à Sergueï Lavrov, son homologue russe à Moscou ainsi que les accords diplomatiques et économiques qui s’en est scellés participent à ce remodelage.
    Le président turc, R. T. Erdogan, politiquement mis à mal dans son pays, tout en restant un pilier de l’OTAN, joue sur plusieurs tableaux, après s’être rapproché d’Israël, il cherche également à se réconcilier avec Damas. Il prend une place centrale dans les négociations qu’il héberge à Istanbul entre l’Ukraine et la Russie comme il l’a fait lors des négociations d’Astana sur le conflit syrien ou encore sur le conflit du Haut Karabakh ; son rapprochement avec Damas et avec Israël pourrait également participer à ce jeu de chaises musicales au Moyen-Orient.

    Il semblerait que l’alliance des pays occidentaux avec les États-Unis contre la Russie ait effrayé tous ceux qui gardent et cherchent à avoir de bonnes relations avec elle.

    La façon dont l’Amérique de Joe Biden a lâché les Afghans (en laissant le pays revenir au Moyen Âge), son incapacité à faire stopper la guerre au Yémen provoquant les attaques des Houthis sur les sols saoudien et émirati ont fait la démonstration pour bon nombre de pays de la région qu’il était dangereux de mettre tous leurs œufs dans le même panier, sous la protection de l’oncle Sam… C’est ainsi que Mohamed Ben Salmane vient d’obliger le président du Yémen en exil Mansour Hadi à démissionner dans une énième tentative de paix, en donnant la gestion des affaires à un conseil présidentiel. S’il n’est pas certain que les Houthis en accepteront toutes les conséquences, le besoin urgent d’aide humanitaire de l’ouverture de l’aéroport de Sanaa et du port d’Hodeïda, pourrait les pousser à au moins accepter d’entamer de véritables négociations. L’avenir de la sécurité au Moyen-Orient ne pouvant plus reposer sur les Américains, de nouvelles dispositions doivent être prises au niveau régional. 

    S’il fallait une autre preuve, le refus des Algériens à Doha lors du Forum des Pays exportateurs de gaz (GECF) de livrer du gaz à certains pays européens, excepté à l’Italie, en serait une autre démonstration.

    L’évolution de la dynamique du pouvoir mondial et des pratiques régionales réoriente rapidement de nombreux États du Moyen-Orient qui préfèrent s’éloigner de Washington par peur.

    L’Iran sous sanctions américaines cherche également à jouer un rôle et à apaiser les tensions régionales entre les partisans des accords d’Abraham et ceux qui ne veulent en entendre parler.

    À cause de la guerre en Ukraine, les négociations sur le nucléaire iranien ont pris du retard. La Russie, important négociateur sur le JCPOA, a en effet réclamé que les nouvelles sanctions appliquées par les Américains depuis l’invasion russe en Ukraine, ne le soient pas en ce qui concerne son commerce avec l’Iran, laissant ainsi aux Américains, comme ultime moyen de pression sur les Iraniens, la menace de laisser les Gardiens de la Révolution sur leur liste terroriste.  

    En Asie centrale, la rencontre et le soutien du Premier ministre Pakistanais Imran Khan avec Vladimir Poutine, ainsi que son refus d’accepter l’implantation de bases militaires américaines sur son sol, ont fortement déplu aux Américains. Il est vrai que le rapprochement que le Pakistan a opéré avec la Chine et son soutien à la « Belt and Road Initiative » dont le port de Gwadar au Balouchistan doit faire partie, avait déjà commencé à envenimer les relations entre les deux pays. Imran Khan vient d’être destitué dans ce qui semble être un coup d’État imposé aux militaires pakistanais par les Américains. De graves troubles dans le pays sont à craindre, risquant s’il en était encore possible de déstabiliser le voisin afghan.

    Enfin, la réunion organisée par le ministre des Affaires étrangères chinois avec ses homologues d’Asie Centrale dans la province d’Anthui en Chine afin de se mettre d’accord sur une position commune sur le conflit Ukraine Russie,  ainsi que  les accords commerciaux et diplomatiques qui s’en sont suivis, montrent qu’une nouvelle organisation géopolitique du monde est en marche.

    Pas sûr que les appels téléphoniques de Joe Biden au président indien, Narendra Modi ainsi qu’à Cyril Ramaphosa, son homologue de l’Afrique du Sud pour avoir une explication sur leur abstention sur le vote pour évincer la Russie de la CNDH ne puissent empêcher ce bouleversement géopolitique. 

    Pas sûr non plus, que l’insistance des Américains à vouloir prolonger la guerre et à livrer des armes lourdes à l’Ukraine ne constitue pas un énorme risque pour l’Europe.

    Patricia Lalonde (Geopragma, 18 avril 2022)

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